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5 mai 2012 6 05 /05 /mai /2012 10:20
Tant que Grodno était encore au sein de l’Union Soviétique, le musée que nous visitons aujourd’hui était un musée de l’athéisme. J’aurais aimé savoir ce qu’il contenait, car à part des écrits hostiles aux religions il n’y a pas grand-chose à montrer, je pense, sur l’absence de religion. Ou alors peut-être des images caricaturales. Mais je n’ai rencontré à Grodno personne qui l’ait visité à l’époque. Par ailleurs, depuis que les Nazis ont anéanti la population juive de Grodno et que les Soviétiques ont effectué de vastes transferts entre les populations polonaises catholiques de la Grodno ancienne et des populations russes et ukrainiennes orthodoxes, la ville se partage entre athées restés athées, minorité catholique ayant repris la pratique religieuse avec ferveur et près de la moitié des habitants se déclarant orthodoxes avec des niveaux de pratique divers. Dans ces conditions, le musée a été contraint de changer de nom et d’objet. C’est désormais un musée des religions et de l’athéisme et, pour compenser les vides, je suppose, il sort largement de son sujet avec bien des pièces qui tiennent aux arts et traditions populaires plus qu’aux religions.
 
783a1 Vénus paléolithiques (Russie près frontière Biél
 
Néanmoins, c’est avec des objets de culte que je commence, car ce sont les plus anciens des collections du musée. Il est indiqué que la statuette de femme, à gauche, a été sculptée il y a vingt-deux mille ou vingt mille ans dans une défense de mammouth. Celle de droite est du paléolithique tardif. Et les objets présentés ne sont que des moulages dont il n’est pas dit où sont conservés les originaux. Et rien ne dit non plus que ce sont à l’évidence des objets de culte.
 
783a2 maquette de village 15e-11e s. avant JC
 
Cette maquette en plâtre, polystyrène et carton d’un village de huttes enneigé représente un habitat des quinzième à onzième siècles avant Jésus-Christ en Polésie, région du sud de la Biélorussie et du nord de l’Ukraine, à l’emplacement de la ville de Pripiat. Cette ville, créée de toutes pièces en 1970, est une ville d’Ukraine à une quinzaine de kilomètres de la frontière Biélorusse, ville fantôme aujourd’hui depuis l’explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl située à 3 kilomètres seulement.
 
783a3 Moulage d'un cheval 7e-4e siècle avant JC (district
 
cette statuette est le moulage d’un cheval daté entre le septième et le quatrième siècles avant Jésus-Christ. Il provient des environs de Gomel, dans le sud-est du pays.
 
783b1 Moulage d'une amulette (Vitebsk, 10e-11e s.)
 
Cette fois-ci, nous sommes dans le nord-est de Biélorussie, région de Vitebsk (la patrie de Marc Chagall), pour cette amulette datée dixième ou onzième siècle.
 
783b2 décoration coiffure femme, d'un cimetière 10e-12e s
 
C’est dans une tombe datant des dixième / douzième siècles d’un cimetière des environs de Grodno qu’ont été trouvés ces petits objets pentagonaux. Ils avaient servi de parure dans la coiffure de la femme enterrée là.
 
783b3 Reconstruction d'après restes trouvés dans cimetiè
 
Cette très jolie jeune femme, d’après une inscription sur sa tombe, se nommerait Iatsviajanka et serait morte au douzième ou au treizième siècle. Son visage a été reconstitué à partir de l’examen de ses restes.
 
783b4 église 12e s. à Grodno, détruite au Moyen-Age
 
Dans mon article sur la ville de Grodno, je disais que trois églises avaient été construites sur le site dans le courant du douzième siècle, mais que dés la fin du même siècle, en 1183, la foudre avait détruit deux d’entre elles, seule subsistant celle que j’ai montrée, Saint Boris et Saint Gleb. Sur cette photo, on voit une maquette de l’une des deux petites églises détruites par la foudre.
 
783b5 aiguière allemande, 1e moitié 13e ., trouvée à Gr
 
Ma photo rend assez fidèlement la couleur du métal dans lequel est fait ce cavalier. On dirait bien de l’étain, mais la notice dit qu’il est en bronze. Problème de patine sans doute. Quoi qu’il en soit, c’était une aiguière, peut-être destinée à un usage liturgique. C’est un produit de l’artisanat d’Allemagne du nord datant de la première moitié du treizième siècle, mais trouvé à Grodno, preuve des échanges entre ces deux régions. Je trouve très beau ce petit objet (même si hélas la tête du cavalier est tronquée), mais ce cheval qui, en lieu et place de sabots comme ses congénères, est doté de petits pieds, je le trouve fort amusant.
 
783c1 Panorama de Grodno au 16e siècle
 
Nous voyons ici la reproduction (1957) d’une gravure de 1568 représentant un panorama de Grodno. Hé oui, depuis le seizième siècle la ville s’est développée…
 
783c2 Tyzenhaus, staroste de Grodno (1733-1785)
 
J’ai eu l’occasion de parler de Tyzenhaus (1733-1785), staroste de Grodno, lorsque j’ai montré une statue de lui en ville. Mais si le portrait ci-dessus a des airs d’ancienneté, il n’en est rien car il date de 2008. Indépendant pour la première fois de son histoire, à part une très brève période après la Première Guerre Mondiale et la naissance de l’URSS, le pays cherche son identité. Partagé entre Russie et Pologne, ou partie du grand-duché de Lituanie, ou intégré à l’Union Soviétique, sans aucune frontière naturelle au milieu d’une immense plaine, il n’a d’unité que par l’aire géographique déterminée par sa langue. Or, pendant les décennies de son appartenance à l’URSS, la Biélorussie a dû pratiquer le russe en langue officielle et les villes ont été peuplées de non biélorusses, de sorte que seuls les paysans et, en ville, les intellectuels militant pour leur identité s’expriment en langue biélorusse. Même l’unité définie par l’aire linguistique a disparu. Pour l’immense majorité des populations, il convient de créer de toutes pièces une identité à partir des hautes personnalités qui, au sein du grand-duché de Lituanie, ou au sein du royaume de Pologne, ou au sein de l’Empire Russe, ont œuvré pour la Biélorussie. C’est pourquoi depuis une vingtaine d’années on recrée des portraits, des statues, etc., d’hommes et de femmes du passé. Tyzenhaus est l’un d’eux, comme Kosciusko, comme Vytaut et quelques autres. Exit l’Homo Sovieticus. L’homme biélorusse est né.
 
783c3 Journal de Grodno du 9 avril 1778
 
Contemporain de Tyzenhaus est ce Journal de Grodno (Gazieta = journal) daté du 9 avril 1778 et rédigé en langue polonaise. Comme quoi, sous la férule polonaise, cette ville biélorusse pratiquait la langue polonaise dans les milieux instruits (les classes populaires ne savaient pas plus lire ici qu’à Paris ou à Londres).
 
783c4 Assiette fin 19e s., Philippe d'Orléans, régent
 
La légende de cette assiette est surprenante. Elle signale une œuvre de biscuit de la fin du dix-neuvième siècle qu’elle attribue à un certain Alfred Kaché, Vierzon – Paris. Et c’est tout. Or, d’une part, les porcelaineries établies à Vierzon au dix-neuvième siècle sont suffisamment célèbres, il y a notamment celle d’Alfred Hache qui, en cette fin de dix-neuvième siècle, exporte une grande part de sa production, vers les États-Unis comme vers l’Europe de l’est. Je suis convaincu que le porcelainier auteur de cette assiette est en fait Alfred Hache. Par ailleurs, sous le buste et collée au dessin il y a une inscription totalement invisible ici, mais parfaitement lisible sur ma photo originale. Pour la situer, je dirai qu’elle se trouve environ entre le centième et le cent vingtième degrés dans le sens contraire au sens trigonométrique (donc en partant de "midi" et en tournant dans le sens des aiguilles d’une montre). Cette inscription dit "Philippe d’Orléans (régent)". Ce petit-fils de Louis XIII, neveu de Louis XIV, assurera la régence du royaume de France entre la mort de Louis XIV en 1715 et le sacre de Louis XV en 1722 (à l’âge de 12 ans et demi… jeune majorité). Il est difficile de croire que les personnes chargées de rédiger les légendes des pièces exposées, voire le conservateur du musée lui-même, aient ignoré, en lisant cette inscription, qui pouvait bien être ce Philippe d’Orléans. Et sinon, difficile de comprendre pourquoi l’évocation de ce nom est consciemment passée sous silence. S’il s’agissait de vilipender le système monarchique, il y avait là matière à s’en donner à cœur joie avec ce régent à la vie dissolue.
 
783d1 Robe, parapluie, cartes postales fin 19e, début 20e
 
La robe blanche de cette vitrine, tout comme le parapluie, les deux cartes postales et la photographie encadrée sont de la toute fin du dix-neuvième siècle ou du tout début du vingtième. Nous voici donc arrivés tout près de l’époque actuelle.
 
783d2 La rue du Château (ulitsa Zamkavaya), Grodno, début
 
Un château fort, en russe, c’est zamok, et en biélorusse zamak. Cette carte postale du début du vingtième siècle représentant "ulitsa Zamkova", à Grodno, c’est donc la "rue du Château". Et elle n’a pas tellement changé. Je reconnais parfaitement la rue que nous avons prise l’autre jour pour aller visiter le musée du Nouveau Château. On peut reconnaître aussi, au fond, la tour de la caserne de pompiers que j’ai montrée dans mon article sur la ville. Mais l’asphalte a remplacé les pavés et les voitures automobiles ont investi les lieux.
 
783d3 Voeux de Pâques, carte postale début 20e siècle
 
      Dans son cadre de velours bleu, cette carte postale du début du vingtième siècle nous souhaite de joyeuses Pâques. Nos pays de tradition catholique connaissent les œufs de Pâques, souvent en chocolat, mais cela n’a rien de commun avec les traditions des pays orthodoxes. On met des pelures d’oignon dans l’eau où l’on fait cuire des œufs pour les colorer en rouge, on confectionne des pains de viande où l’on incorpore des œufs, on peint délicatement toutes sortes de sujets, religieux ou non, sur des coquilles d’œufs ou sur des œufs artificiels en bois, et l’on peut s’offrir des œufs aussi gigantesques que sur cette carte postale.
 
783e1 Maquette du temple de Salomon du 10e s. avant JC
 
Des vénus préhistoriques, une amulette, la maquette d’une église détruite, des vœux pour la fête religieuse de Pâques, effleuraient l’objet annoncé par le titre de ce musée des religions et de l’athéisme. Mais voici venu le moment où l’on aborde directement le sujet. Cette maquette au 150e représente le premier temple de Salomon, construit au dixième siècle avant Jésus-Christ. Il sera détruit en 586 par le roi de Babylone Nabuchodonosor. Mais quiconque, comme moi, aime Verdi, connaît le thème de l’opéra Nabucco. Ce temple sera relevé en 516 et rénové par le roi Hérode en 19 avant Jésus-Christ. Les Romains l’abattront en 70 après Jésus-Christ. Le Mur des Lamentations datant d’Hérode ou, selon des découvertes très récentes, plus tardif (seconde moitié du premier siècle après Jésus-Christ), est sacré dans la religion israélite parce que le plus proche du "Saint des saints".
 
783e2 Le Sacrifice d'Isaac par Abraham (St-Pétersbourg 186
 
Cette gravure (Saint-Pétersbourg 1869) représente le sacrifice d’Isaac par son père Abraham, au moment où arrive l’ange pour arrêter le bras du sacrificateur et apporter le bélier qui sera égorgé à la place d’Isaac. Curieux, Abraham a l’air très mécontent de cette intervention.
 
783f1 Torah 19ème siècle
 
Dans la religion juive, la Torah ("la Loi") est constituée des cinq livres de Moïse, ou Pentateuque, première partie de la Bible admise par les Chrétiens. Ces cinq livres sont la Genèse, l’Exode, le Lévitique, les Nombres et le Deutéronome. La Torah doit être copiée sans faute, et si une faute est commise elle ne peut être corrigée, il faut recommencer la copie depuis le début. La rédaction est réalisée sur des rouleaux de parchemin que l’on déroule au fur et à mesure de la lecture. Sur la photo ci-dessus, nous voyons à gauche le quatrième livre, les Nombres et à droite le troisième, le Lévitique. Ces documents datent du dix-neuvième siècle. Pour suivre sa ligne lors de la lecture à voix haute dans la synagogue, on utilisait la baguette d’argent représentée ici, qui se termine par une main au doigt pointé.
 
783f2 Crécelle juive
 
Je n’ai pas vu, dans le musée, d’explication pour la présence de cette crécelle dans la salle réservée à la religion juive. Ce que j’en sais, c’est qu’elle est utilisée lors de la célébration du Pourim (février ou mars selon les années), en commémoration d’un complot d’Haman, vizir perse du temps d’Assuérus, déjoué par les Juifs. L’épisode est raconté dans le Livre d’Esther. On fait retentir la crécelle à chaque fois qu’est prononcé le nom de Haman, ennemi des Juifs, modèle de l’antisémite. À cette tradition juive, je vais ajouter un souvenir d’enfance et d’adolescence dans la religion catholique. Du Vendredi Saint au dimanche de Pâques, on ne pouvait faire sonner de cloches. Mais lors des offices, au moment où l’enfant de chœur ou le servant devait, le reste de l’année, agiter la sonnette, par exemple pour l’Élévation, cette toute petite sonnette était tout aussi proscrite que les grosses cloches du campanile, et on la remplaçait par un tour ou trois tours de crécelle. Le concile Vatican II a mis fin à cette pratique.
 
783g1 Médine, gravure début 20e siècle
 
L’an 622, lorsque le prophète Mahomet a dû fuir de la Mecque à Médine, cette fuite, l’Hégire, marque l’an I de l’Islam. C’est aussi à Médine qu’il est mort dix ans plus tard, et qu’il a été enterré. Ici, cette salle est réservée à la religion musulmane, et cette gravure du début du vingtième siècle représente la ville de Médine.
 
783g2 Prière à la mosquée, Novogrudok 1920
 
Cette reproduction d’une photo de 1920 montre des fidèles musulmans en prière dans la mosquée de Novogrudok, cette ville située à 160 kilomètres à l’est de Grodno et qui, comme je le disais dans mon article sur la ville de Grodno, est devenue capitale du grand-duché de Lituanie au treizième siècle.
 
783h1 Martin Luther, biscuit et bois, fin 18e-début 19e s.
 
783h2 Le pape de Rome, bois 18e s. (copie 1985)
 
Nous en venons au christianisme, la première photo montrant Martin Luther (biscuit et bois, Allemagne, fin dix-huitième siècle ou début dix-neuvième), et la seconde le pape de Rome avec sa tiare démesurée (copie réalisée en 1985 d’une statue de bois du dix-huitième siècle). J’ignore l’intention des artistes qui sont à l’origine de ces œuvres, mais je suppose que ceux qui les ont sélectionnées pour les faire figurer ici dans ce musée précédemment de l’athéisme ont dû se régaler. Car enfin ce Luther grassouillet assis sur un livre qui doit être la Bible est assez ridicule. Mais surtout, surtout, ce pape dont la légende donne pour son origine l’Europe, ce qui dans son imprécision abyssale est très évident pour ce musée dont pas un seul objet ne provient d’Asie, d’Amérique ou d’Afrique, je le trouve comique et caricatural. Or si, à l’époque de réalisation de ces statuettes, nous sommes encore à plus d’un siècle de l’athéisme soviétique, nous n’en sommes pas moins au siècle des Lumières, aux environs de la Révolution Française qui a transformé l’église Sainte Geneviève en temple de la Raison, etc. Il est donc tout à fait possible que ces statuettes aient été volontairement ridicules. Et si, par ailleurs, je ne trouve aucune qualité esthétique à ce pape, en revanche le Luther est un joli objet.
 
783i1 Christ en bois (Biélorussie, 16e siècle)
 
Ce Christ, dont la croix n’a pas été conservée, date du seizième siècle. Il est dit, sans autre précision, qu’il est de Biélorussie. Les églises orthodoxes étant peuplées d’icônes mais dépourvues de statues, je pense qu’il provient plutôt de la partie catholique du pays, le côté polonais.
 
783i2 Saint Casimir, bois, 1630
 
Détail d’une grande statue en bois de 1630 représentant saint Casimir. Lorsque j’ai des questions à poser et que je trouve en face de moi des personnes ne parlant que russe ou biélorusse, je suis bien embarrassé, surtout lorsque la question se prête mal à l’expression par gestes. Mais Natacha ne connaît pas ce problème, et elle a demandé à une personne qui garde la salle d’où provient cette statue. "Je ne peux pas vous le dire", lui a-t-il été répondu. En russe, konietchno (= bien sûr). Elle a alors insisté, voulant savoir pourquoi cette dame ne pouvait pas répondre. "Nous le savons, mais il nous est interdit de le dire". Cela donne à Natacha une idée. J’ai parlé d’une très grande esplanade de Grodno appelée Sovietskaya, à chacun des angles de laquelle il y avait autrefois une église. Dans l’angle en face de la cathédrale catholique Saint François-Xavier, une autre église catholique consacrée à saint Casimir a été abattue en 1961, acte hautement symbolique parce que saint Casimir, mort à Grodno en 1484, y était l’objet d’une grande dévotion, et depuis rien n’a été construit sur ce terrain vague. Aussi Natacha suppose-t-elle que cette statue de saint Casimir provient de cette église, et qu’avec le retour de bien des gens à la pratique religieuse on n’ose pas trop faire étalage de cet acte de vandalisme sur le plan artistique et sacrilège aux yeux des croyants. Mais j’insiste sur le fait que ce n’est qu’une supposition très vraisemblable, à ne pas prendre cependant pour une certitude.
 
783i3 Carreau de céramique, Séraphin à 6 ailes (Russie 1
 
Ce carreau de céramique émaillée représente un séraphin avec six ailes. Les anges sont hiérarchisés en neuf catégories qui sont les séraphins (six ailes), les chérubins (quatre ailes), les trônes, les dominations, les autorités, les puissances, les principautés, les archanges et les anges. Dans la Bible, livre d’Isaïe, on peut lire "Dans l’année où mourut le roi Ouzia, moi, cependant, je vis le Seigneur, siégeant sur un trône haut et élevé, et les pans de son vêtement remplissaient le temple. Des séraphins se tenaient au-dessus de lui. Chacun avait six ailes. Avec deux il tenait sa face couverte, et avec deux il tenait ses pieds couverts, et avec deux il volait". Généralement, au seizième siècle, ces carreaux étaient monochromes, et c’est de cette région-ci qu’est parti l’usage de les réaliser en polychromie. Celui-ci, du dernier quart du dix-septième siècle ou du début du dix-huitième, provient de Russie. Probablement faisait-il partie de la couverture d’un poêle comme on les faisait autrefois dans ces pays de l’est, vastes et couverts de carrelages, sur lesquels on pouvait s’asseoir ou s’étendre.
 
783i4a Anges à la trompette (Biélorussie 18e s.)
 
783i4b Ange à la trompette (Biélorussie 18e s.)
 
783i4c Ange à la trompette (Biélorussie 18e s.)
 
Ces deux anges de bois peint, avec leur trompette, me plaisent beaucoup. Ils sont biélorusses et datent du dix-huitième siècle. L’un n’a que deux ailes, l’autre les a même perdues, ce n’est que de la piétaille d’anges, loin des séraphins et des chérubins. Pouah !
 
783j1 Anne apprenant à lire à Marie (1re partie 19e s.)
 
Sainte Anne apprenant à lire à sa fille, Marie, est un thème fréquent de la peinture ou de la statuaire religieuses, mais la légende placée par le musée précise que c’est seulement à partir du seizième ou du dix-septième siècle que, puisant ce sujet dans le Protoévangile de saint Jacques le Mineur, les artistes ont commencé à le représenter. En fait, ce texte rédigé au deuxième siècle de notre ère, qui se dit écrit par saint Jacques ce qui est à l’évidence faux, a été trouvé et diffusé en Occident par l’humaniste français Guillaume Postel. Il est dit Protoévangile, ou Protévangile, parce qu’il raconte des faits antérieurs à ceux que rapportent les quatre évangiles canoniques. Dans ce tableau de la première partie du dix-neuvième siècle Marie a ce visage des petites filles qui ont déjà des traits de femme. Je ne trouve pas beaucoup d’expressivité dans cette peinture froide.
 
783j2 Nativité , huile sur bois, argent (Russie, 1861)
 
En revanche, cette Nativité peinte à l’huile sur bois et habillée d’argent est très jolie. La façon dont Marie regarde avec tendresse et attention son bébé qu’elle presse contre elle est pleine de sensibilité. Cette œuvre provient de Russie et date de 1861.
 
783j3 Saint Jean (bois sculpté, Kiev, fin 19e siècle)
 
Ce bois sculpté qui vient de Kiev, en Ukraine, date de la fin du dix-neuvième siècle. La notice dit qu’il s’agit d’un saint Jean qui a beaucoup souffert. Tel qu’il est représenté, je le trouve trop vieux pour être saint Jean Baptiste, qui a été décapité et avait à peu près le même âge que Jésus (l’Annonciation vient d’avoir lieu quand Marie se rend auprès d’Élisabeth qui va accoucher dans trois mois). Ce serait donc saint Jean l’évangéliste, mort très âgé, représenté ici sans l’aigle qui l’accompagne habituellement mais devant le livre ouvert de son évangile. À moins que la notice ne soit fausse et que ce ne soit pas un saint Jean.
 
783j4 Relief Nativité, 19e-début 20e siècle
 
Les indications données pour cet objet sont très vagues. C’est une Nativité (ça, je le vois) en relief du dix-neuvième siècle ou du début du vingtième. Aucune précision n’est donnée sur son lieu d’origine, sur sa matière, sur son usage. Son aspect donne l’impression que c’est de la nacre, mais je ne vois pas quel mollusque géant aurait pu donner une telle dimension de nacre d’un seul morceau, et une imitation en substance synthétique est exclue à cette époque. Je n’ai donc aucune réponse à mes questions d’origine et de matériau. Quant à cet objet en forme de demi-sphère, je doute que ce ne soit un simple bibelot décoratif, et je me demande s’il serait absurde de supposer que ce soit un couvre patène ou quelque chose d’approchant.
 
Pour conclure cet article, j’ai envie de dire que j’ai vu avec plaisir et intérêt beaucoup de choses, sans grande unité mais après tout qu’importe. Mais j’ai aussi envie d’ajouter une critique. Non seulement les étiquettes sont souvent collées sur un coin sombre des vitrines, ce qui les rend extrêmement difficiles à lire, mais de plus, selon l’humeur de leur auteur, tantôt elles regorgent d’informations (expliquant qui est Marie, mère de Jésus, femme de Joseph, etc.) et tantôt elles sont indigentes comme pour ce dernier objet, voire parfois absentes comme pour la crécelle.
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commentaires

J
Bonsoir. J'ai visité ce musée de l'athéisme en 1991, à la fin de l'URSS. Je l'ai revisité ultérieurement mais il avait été déplacé car il était dans une église qui a été réatribuée me semble-t-il<br /> au clergé uniate.<br /> La collection avait été aussi minorée d'objets du clergé orthodoxe à qui il avaient été partiellement réatribués.<br /> Sinon, je vous rejoins sur votre avis général.
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C
Voir Blog(fermaton.over-blog.com).No-9 - THÉORÈME SARTRE. - Pensée moderne ?
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