Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
30 novembre 2009 1 30 /11 /novembre /2009 01:37

Ce matin, nous nous dirigeons à pied vers la gare de Tivoli dans l’intention de prendre un train pour Rome. Mais là, quelle n’est pas notre surprise de constater qu’il n’y a pas de train le dimanche avant 12h45. Si l’on ajoute le retard habituel de dix minutes ou un quart d’heure, l’heure de trajet vers la gare de Rome, puis le métro, notre journée va être pas mal entamée. Nous retournons donc au camping-car et affrontons les importants embouteillages, tant sur la route que dans Rome. Heureusement, nous trouvons sans mal un stationnement gratuit à faible distance de la gare Termini. Un coup d’œil au plan de Rome pour savoir ce que nous pouvons voir dans ce coin : les Thermes de Dioclétien.

 

L’église Santa Maria degli Angeli e dei Martiri, représentée ci-dessus, a une histoire. L’empereur Dioclétien commanda la construction de ces bains, dont les travaux durèrent de 295 à 305 de notre ère. Et comme sa tendresse pour les chrétiens était limitée, il condamna quarante mille d’entre eux aux travaux forcés et les utilisa pour cette construction. Quarante mille chrétiens ! Rien que ce chiffre donne une idée de l’immensité de ces thermes, qui restèrent en usage jusqu’au sixième siècle. Mais les Goths, autres gens fort sympathiques, arrivèrent alors et détruisirent les aqueducs romains. Plus d’eau, plus de bains. Il faut dire que ces nomades ayant parcouru des distances considérables ne devaient pas être très habitués aux bains confortables.

 

 

Considérant ce gros édifice construit pour un païen par des chrétiens maltraités, le pape Pie IV décida, au milieu de seizième siècle, de racheter cette impiété et confia à Michel-Ange le soin de réutiliser ce qu’il pouvait, ou voulait, des thermes pour édifier une église. À l’époque (1561), l’artiste avait 86 ans, âge plus que respectable pour ce siècle. Il avait au maximum respecté le bâtiment de Dioclétien, mais il est mort en 1564, et ses successeurs ont été moins respectueux. Il n’empêche que le mur de façade concave en brique est celui des thermes. La photo ci-dessus montre l’un des bras de cette monumentale église en forme de croix grecque, c’est-à-dire dont le transept coupe la nef par son milieu. Les colonnes ont été conservées de l’antiquité, ce transept occupant la grande salle centrale du bâtiment de Dioclétien.

 

À droite, cet ange portant un bénitier est une sculpture baroque du dix-huitième siècle. J’aime particulièrement son visage. Il y a aussi bien d’autres choses à admirer dans cette église, et notamment d’immenses tableaux provenant du Vatican, lorsqu’à Saint-Pierre ils ont été remplacés par des mosaïques. Mais si je les mettais ici je n’en finirais plus : cette journée a été si riche que non seulement je dois en faire deux articles de blog, mais même ainsi j’ai eu un mal fou à décider de mon choix d’images, j’avais envie de tout mettre.

 

 

Malgré tout, je ne peux résister à montrer au moins l’une des curiosités de cette église. Au sol du bras droit du transept le dallage représente, sur une immense diagonale, le déroulement de l’année, avec des images des signes du zodiaque. Au début de cette diagonale, la représentation ci-dessus. Et puis, dans le plafond, un trou très petit laisse passer un rayon de soleil. Il s’agit d’une méridienne construite par Francesco Bianchini et inaugurée par le pape Clément XI le 6 octobre 1702. Selon l’endroit du sol que frappe le rayon de soleil à telle ou telle date, on peut déterminer l’heure exacte. On a utilisé ce système dans le passé pour régler les horloges de Rome.

 

 

J’en finirai avec Santa Maria degli Angeli e dei Martiri en montrant l’une des sculptures modernes décorant les portes de l’église. C’est sobre, original, évocateur. Je ne sais si mon jugement est personnel ou s’il est partagé…

 

 

Lorsque nous sommes arrivés devant cette église, nous n’avions absolument pas prévu qu’une estrade serait dressée sur son parvis, et qu’une femme réciterait des Ave Maria dans un micro, sur des haut-parleurs à puissance maximum. Nous nous approchons. Un grand calicot tendu par deux personnes informe qu’il s’agit d’honorer la "Santísima Virgen del Quinche", et que s’est rassemblée là l’Association des Familles Équatoriennes Résidant à Rome. Les familles équatoriennes ! Je me suis alors approché de l’homme qui tenait l'une des extrémités du calicot et, rassemblant mes souvenirs de langue espagnole en essayant de ne pas y mêler des mots de cet italien dont depuis près d’un mois j’essaie de m’imprégner, je lui ai dit que mon fils Raphaël avait vécu quelque temps en Équateur, que son amie Vanessa était de cette nationalité et qu’elle était très sympa, mais il n’était guère intéressé par mes propos. Je lui ai dit être étonné de voir ici tant d’Équatoriens, alors que l’on s’attendrait plutôt de leur part à une émigration vers l’Espagne, dont ils parlent la langue. Il m’a répondu que l’Italie était numériquement leur second pays d’émigration. Et comme sa réponse était laconique, j’en suis resté là de ma conversation.

 

Nous sommes restés après la fin des prières récitées sur le parvis, et avons vu l’entrée en procession dans l’église. Puis de très nombreux prêtres sont arrivés de la sacristie pour concélébrer une messe. Ils avançaient solennellement en rang par deux. Toutefois, l’un d’entre eux a sorti un petit appareil photo et a pris quelques images souvenir tout en s’avançant.

 

 

C’est dommage, je n’ai pas compris l’origine de cette cérémonie. Lors de son homélie, le prêtre l’a expliquée, mais à plusieurs reprises un larsen à vous arracher les oreilles a rétro alimenté le micro, et même sans larsen le son était si puissant que les haut-parleurs vibraient de toutes leurs membranes, rendant incompréhensible ce qui se disait. D’ailleurs, la foule était partagée entre une grande dévotion des uns, et pour d’autres, discutant à voix haute, se faisant des signes, ne cherchant nullement à écouter ou à participer, leur présence semblait plus folklorique qu’empreinte de foi.

 

 

Cette fois je quitte l’église Santa Maria degli Angeli. Elle a beau être immense, les thermes de Dioclétien étaient si gigantesques qu’elle laisse encore un espace lui aussi immense, et même bien plus, pour un musée. On peut y voir toutes sortes d’antiquités, dont cette Déméter d’argile reconnaissable aux épis de blé qu’elle tient négligemment dans sa main droite, et à sa couronne également en épis de blé. En effet, Déméter est la déesse maternelle de la Terre cultivée et du blé. À son sujet, la légende dit que sa fille Perséphone jouait avec les nymphes sans penser au mariage quand son oncle Hadès (elle a pour père Zeus, frère d’Hadès, dieu des Enfers) tomba amoureux d’elle et l’enleva. Déméter décida alors que tant que sa fille ne lui serait pas rendue elle ne retournerait pas sur l’Olympe, privant les hommes de récolte de blé. À la fin Zeus céda, et un compromis fut accepté. Perséphone serait rendue à sa mère six mois par an, et depuis elle revient au printemps, faisant apparaître les pousses de blé en même temps qu’elle remonte à la surface de la terre, mais retourne aux Enfers les six autres mois, laissant la terre improductive de blé.

 

 

Le sarcophage de Julius Achilleus (environ 270 après Jésus-Christ) porte la dédicace de sa femme Aurélia Maxima qui le qualifie de "vir perfectissimus", homme absolument parfait. Il a exercé des fonctions à la chancellerie de l’empereur, puis a été superintendant de la caserne des gladiateurs de Rome. Mais son sarcophage représente des scènes beaucoup plus paisibles et champêtres. Des bœufs, des chevaux, tout plein de moutons, deux chèvres, un pâtre qui rêvasse, un autre, son chien à côté de lui, qui coupe une branche avec sa faucille, je trouve cette scène sympa.

 

 

Après la visite de cette partie assez conventionnelle du musée, je veux dire des salles ou des allées avec des œuvres alignées le long des murs ou au centre des pièces, on ressort dans la cour et l’on pénètre dans une très vaste salle au plafond d’une hauteur vertigineuse, autre salle des bains, et là sont reconstituées trois chambres funéraires telles qu’elles ont été trouvées en 1951 lors de travaux d’urbanisme. Des photos d’époque permettent de les voir sur site, mais elles ont été transportées dans ce musée des thermes dans leur intégralité. L’une d’entre elles comporte de nombreuses niches destinées à recevoir les cendres de membres de la famille, mais au sol ont aussi été enterrées des personnes, et les murs sont recouverts de peintures. Une autre tombe, en face, comporte ce plafond décoré de stucs (ci-dessus).

 

Quant à la troisième tombe, plus vaste, elle a été décorée de statues des membres de la famille enterrés là. Le buste représenté ici serait celui d’une certaine Minatia Polla enterrée en 40 après Jésus-Christ. Je trouve émouvante cette tête de jeune fille, qui paraît tellement vivante dans sa tombe… Pour moi, ce genre de rencontre me plonge dans l’Antiquité comme s’il s’agissait de mon présent et comme si j’avais connu cette jeune fille. Mais je débloque sans doute !

 

Passons. Notre ticket regroupe le musée des thermes de Dioclétien dont je viens de parler, le Palazzo Massimo alle Terme –dont je vais parler dans mon prochain article de ce blog–, l’Aula Ottagona –planétarium des thermes, fermé pour travaux, mais dont les œuvres principales ont été transférées au Massimo–, la Palazzo Altemps ainsi que la Crypta Balbi –dont je parlerai plus tard encore. Nous avons théoriquement trois jours pour toutes ces visites, mais ces musées étant tous fermés le lundi, nous n’aurons qu’après-demain mardi pour voir ce que nous n’avons pas visité aujourd’hui. Rude programme.

Partager cet article
Repost0

commentaires

Présentation

  • : Le blog de Thierry Jamard
  • : Un long, long voyage d'observation et de description culturelle à travers l'Europe. Paysages, histoire, architecture, peinture, sculpture, mythologie et religions, société, tout ce qui me tombe sous les yeux.
  • Contact

Recherche