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18 octobre 2017 3 18 /10 /octobre /2017 23:55
Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014

Comme je le disais dans mon premier article sur Nisyros, la jeune femme très aimable qui nous a loué une voiture nous a informés que ce samedi soir il y avait une grande fête autour du monastère et de la chapelle Τίμιου Σταυρού (Timiou Stavrou, “de l’Honorable Croix”, nous dirions la chapelle Sainte-Croix). On m’a donné une “Carte ecclésiastique de Cos-Nisyros” que je consulte: sur cette toute petite île, il est repéré pas moins de 107 lieux, églises de ville, chapelles de campagne, basiliques paléochrétiennes, monastères, etc., et celui-ci est classé parmi les dix “vieux monastères, dépendances de la Panagia Spiliani”. Il est dit en grec Παλαίες μονές, en anglais Old monasteries, je traduis “vieux” mais je ne sais pas si cela veut dire qu’il ne s’y trouve plus de moines (ou de religieuses), je n’ai pas pensé à poser la question et maintenant, devant mon clavier, il est trop tard. Mais je n’ai pas vu l’ombre d’un moine. Il y avait bien un prêtre, un “papas”, mais le lendemain matin il était sur le port et prenait le ferry, il ne réside donc pas dans ce monastère. Les bâtiments sont cependant maintenus en excellent état.

 

Après avoir visité le musée du volcan et avoir fini l’après-midi à Nikeia, nous sommes retournés dans la soirée voir le magnifique volcan en attendant l’heure de la fête, vingt heures, puis nous nous sommes rendus, par une route non revêtue mais très carrossable, à ce monastère situé à un peu plus de deux kilomètres du volcan en direction du sud-ouest.

Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014

Le lieu est isolé dans la nature, la population de Nisyros est assez limitée (selon Wikipédia en grec, la population totale était, il y a trois ans en 2011, de 987 habitants), je n’aurais pas cru qu’il y aurait autant de monde, car je dois préciser que nous étions les seuls touristes. Pas un seul étranger autre que nous deux.

Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014
Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014

En terrasse devant le bâtiment, visiblement construits pour cette fête annuelle, des tables et des bancs de pierre maçonnée permettent aux participants de s’installer. Ils vont à l’intérieur, ils prennent de la nourriture et reviennent s’installer ici sur la terrasse pour manger. Parce que c’est gratuit, nous qui ne sommes pas de la paroisse, ou de l’île, nous n’avons pas voulu manger pour ne pas nous sentir pique-assiette, mais l’ambiance est bon enfant, les gens sont gais, discutent, rient.

Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014

Puisque nous ne participons pas aux ripailles, nous sommes allés jeter un petit coup d’œil à la chapelle. Elle est toute petite, toute simple, de sorte qu’en montrant cette photo ci-dessus, j’ai tout montré…

Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014

Après la fin de la monarchie, après la fin de la dictature des colonels, l’État grec a quelque peu assoupli le lien avec l’Église orthodoxe, mais il n’est pas réellement laïc comme en France. Et même si, bien évidemment, on peut être patriote dans un État purement laïc, j’imagine mal dans un réfectoire de monastère cistercien, par exemple, une phrase comme celle-ci peinte sur le mur. Elle dit: “Grèce, ta grandeur n’a pas de royaume”. Je ne suis nullement choqué, je suis étonné, c’est tout.

Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014

On n’en oublie pas cependant qu’il s’agit d’une fête sinon religieuse, du moins liée à la religion et au monastère de la Sainte-Croix. Aussi les festivités vont-elles se dérouler devant la grande icône représentant une croix.

Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014

Ce repas est un moment important. Non pas, ou pas seulement, parce que les participants pensent à leur ventre avant tout, mais surtout parce que le partage du repas a un sens symbolique, entre autres avec la Cène, le dernier repas pris par le Christ avec ses douze apôtres avant sa Passion. Mais si le repas en commun est un moment important, la fête ne se limite pas à cela, comme nous allons le voir. Les musiciens viennent prendre possession de l’estrade, et se préparent à animer la soirée.

 

Et cela sous d’autres signes patriotiques. Un fusil et un sabre croisés au-dessus de trois mots, θρησκεία, πατρίδα, ελευθερία, c’est-à-dire religion, patrie, liberté. Les deux premiers, donc, sont assez intimement liés en Grèce, et le troisième s’explique par la longue occupation ottomane, puis par l’occupation italienne, et enfin durant la Seconde Guerre Mondiale par les armées allemandes du régime nazi. Dans la devise de la France, quand elle a été créée, la liberté se définissait par rapport à la monarchie absolue d’Ancien Régime.

Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014
Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014

Voilà, les musiciens ont commencé à jouer. Le public ne va pas résister longtemps à l’envie de se lever. Les Grecs ont la musique, la danse, la fête dans la peau. Difficile de savoir comment ils étaient avant d’être conquis par un peuple qui avait d’autres coutumes et une autre religion, ces Turcs ottomans qui ont tant marqué leur histoire, il est donc tout aussi difficile de savoir si ce sens de la fête et de la gaîté est né du besoin de se libérer, de se défouler, d’exprimer son âme en dehors du carcan des règles ottomanes, ou si ce peuple a toujours été comme cela. La référence à l’antiquité, aux cômastes, n’a guère de sens à ce sujet, car au cours des siècles les brassages de populations ont été tels qu’il n’y a plus guère, ethniquement parlant, de descendants des Grecs de l’antiquité sur le sol de Grèce. Pas plus que de Gaulois dans notre France envahie par les Romains, les Francs, les Huns, les Wisigoths, les Burgondes, les Normands, etc. Mais ce qui est merveilleux, c’est que ces migrants au cours des âges ont tous adopté la langue locale. Alors que nous ne parlons ni gaulois, ni latin en France, en Grèce on parle la même langue qu’au temps d’Homère. Certes, elle a beaucoup évolué, beaucoup changé, mais le grec d’aujourd’hui ressemble autant au grec antique que le français que nous parlons ressemble au français de la Chanson de Roland, et peut-être même plus.

Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014

Les musiciens se sont relayés. Ils sont excellents. Celui qui joue debout a une énergie, un enthousiasme, exceptionnels. Ce qui ne veut nullement dire que les autres ne sont pas bons musiciens, ou qu’ils ne sont pas capables de mettre de l’ambiance.

 

J’étais assis auprès de celui qui est au premier plan à gauche sur la photo ci-dessus. Tout d’un coup, je le vois qui me regarde fixement en remuant la tête mais sans dire un mot et en continuant à jouer. Étonné, je le regarde, il tourne la tête vers son bras. Une énorme mouche était posée dessus et batifolait dans les poils, ce qui devait le chatouiller, et il ne pouvait rien faire sans cesser de jouer. Je l’ai chassée. Petite anecdote stupide, désolé…

Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014

Comme tout à l’heure à l’extérieur, on s’attable à l’intérieur. Au fond, on va se faire servir, et ce qui est écrit au-dessus du guichet, αίθουσα αγάπης, ne signifie pas “cuisine” ou “chaîne de distribution”, mais “salle d’amour”. Non, non, il ne s’agit pas d’incitation à la débauche, il s’agit de l’amour de son prochain dans le Christ. Nous sommes dans un monastère, que diable! Euh... Cette interjection est peut-être un peu déplacée en ces lieux?

Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014

Il va y avoir de l’animation, mais d’abord on doit prendre des forces. Et puis il fait chaud, il faut se désaltérer. Ho-ho, je vois beaucoup de bouteilles, sur les tables. Et elles n’ont plus l’air d’être très pleines.

Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014
Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014
Nisyros 07, fête au monastère Timios Stavros. Le 13 septembre 2014

Et voilà, beaucoup des convives se sont mis à danser. Ne voyant aucune piste de danse, et un espace très restreint entre les lignes de tables, je me demandais comment il serait possible de danser, je m’imaginais des danses de salon car s’il y a des jeunes, la moyenne d’âge n’est pas celle des discothèques. Mais rien de cela, c’est une sorte de farandole très animée, avec certains pas de danse qui ont l’air d’être conventionnels, et qui tourne autour des tables, se faufilant dans cet étroit espace.

 

Peut-être, pour en donner une idée plus précise, puis-je ajouter la vidéo que j’ai faite? Quand il s’agit de musique, rien ne vaut l’enregistrement du son, et quand il s’agit de danse, rien ne vaut l’enregistrement du mouvement!

Pour la première vidéo, c’est ici, et pour la seconde, c’est là.

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15 octobre 2017 7 15 /10 /octobre /2017 23:55

La petite ville de Nikeia, perchée sur un cône de lave qui domine le volcan de Nisyros, s’est dotée d’un musée du volcanisme. Après avoir vu le volcan lui-même, nous nous devions d’aller en visiter le musée, et nous n’avons pas regretté cette visite, qui est très pédagogique. De nombreux panneaux explicatifs très clairs, en grec et en anglais, permettent de bien comprendre le mécanisme du volcanisme, et de voir comment il a fonctionné à Nisyros.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Je pense qu’il est intéressant, puisque nous sommes à Nisyros, de voir quelle a été, dans cette île, l’évolution du volcan au cours des âges. Le musée a reconstitué l’historique de la géologie et la présente étape par étape. Ci-dessus, c’est Nisyros il y a cent mille ans.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Il y a quatre-vingt mille ans, deux petits orifices se sont formés près du sommet.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Il y a soixante mille ans. Ces orifices ont craché de la lave et il semble qu’ils se soient bouchés.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Il y a cinquante mille ans, d’autres laves ont coulé sur un autre versant.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Il y a quarante-cinq mille ans, c’est-à-dire après un temps d’évolution géologique relativement bref, le cratère central s’est formé, et la totalité du pourtour est recouverte de laves.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Il y a trente-cinq mille ans, le cratère central s’est beaucoup agrandi.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Sur la photo ci-dessus, nous voyons l’île aujourd’hui. Mais il faut bien comprendre que ce grand cratère que nous voyons sur ces illustrations n’est pas celui que nous avons visité dans mon précédent article. Celui de mon article, le volcan Stéfanos, se trouve au fond de ce cratère des illustrations, dans sa partie sud-est. Si Stéfanos, avec son diamètre de 330 mètres, était ce grand cratère représenté ici, l’île serait si petite que l’on ne pourrait y tracer de route et que l’on n’y construirait que quelques rares habitations.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014
Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

D’autre part, on nous montre ce que le volcan a dans ses entrailles. Je suis conscient que ces images, une fois réduites aux dimensions d’un écran d’ordinateur (sans parler d’une tablette ou, pire, d’un smartphone), on ne peut plus rien y lire. Je vais donc transcrire les légendes, en les traduisant puisqu’elles sont en grec et en anglais, pas en français.

 

Première photo: Ce qui est brûlant, en bas, c’est la chambre du magma en fusion. Au-dessus, en gris, à droite et à gauche, ce sont des roches pré-volcaniques. L’espèce de champignon gris foncé qui s’élève au-dessus du magma, c’est la vapeur post-caldera. Ces petits nuages blancs juste à la droite du champignon, c’est la vapeur surchauffée qui s’échappe sous forme de fumerolles. Tout en haut, ce demi-ovale, est-ce la peine de le dire? c’est le rebord du cratère.

 

Seconde photo: D’abord, on voit un petit texte sur la gauche. Il dit “Un volcan est un édifice naturel de lave et de cendre qui se forme en des endroits de la surface de la terre quand de la roche en fusion émerge de fissures dans la croûte”. Cette masse marron tout en bas, c’est la chambre du magma, au-dessus de laquelle est représentée en gris la base non volcanique. Du milieu du magma, part une cheminée, le conduit central, qui se termine en haut en forme d’entonnoir, l’ouverture centrale. On voit s’en détacher à gauche, en diagonale, une cheminée d’où, en émergeant, la lave forme un dôme, tandis qu’à droite une autre cheminée, parallèle au conduit central, n’aboutit pas à la surface et sa lave forme un cryptodôme (dôme caché) à l’intérieur du volcan. De la cheminée qui part en diagonale sur la droite du conduit central, s’écoule de la lave à l’extérieur: sans doute plus liquide, elle ne forme pas un dôme mais se répand. Le cône du volcan est ainsi formé de couches de lave et de couches de cendre. Au sommet, est représentée une gerbe de projections; sur la droite, ces projections sont appelées en grec τέφρα (téphra), ce qui veut dire “cendre”. À gauche, c’est σποδός (spodos), mot que je ne connais pas. Dans le dictionnaire, je trouve “cendres”. Cela me donne un doute, je vérifie téphra, que je croyais connaître… “cendres” également. Si le schéma porte deux noms différents, c’est sûrement qu’il y a une différence. J’avoue ignorer laquelle.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014
Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Maintenant, le problème de la tectonique des plaques. La plaque africaine se déplace vers le nord-est, et vient bousculer les îles de l’Égée. Je ne traduis pas le schéma affiché par le musée, je crois qu’il est clair, avec les montagnes formées sur un arc de cercle sous la pression, dans le Péloponnèse à l’ouest, au bout dans la mer c’est l’île de Cythère, au sud on trouve la Crète, et à l’est de la Crète deux îles montagneuses, Karpathos et Rhodes. Derrière cet arc de la tranchée grecque montagneuse, au nord, c’est l’arc des îles volcaniques. Sur le schéma, de petits volcans symbolisent les points où des volcans se sont formés, et un texte que je ne reproduis pas les cite, ces îles. Parce que tout le monde n’est pas censé avoir en tête une carte de la Grèce avec la situation de toutes ces îles innombrables (avant de les avoir parcourues, pendant des mois et des années, il y en a bien peu que j’aurais été capable de reconnaître par leur forme, ou de situer avec une précision minimum), j’ai dessiné une carte de la mer Égée sud, et j’y ai coloré en marron les sept îles citées, y compris la microscopique Gyali, ainsi que la presqu’île de Methana au nord du Péloponnèse.

 

Je trouve ce schéma du musée extrêmement clair, il fait apparaître en évidence les formations montagneuses et les apparitions de volcans sous la pression de la plaque africaine.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014
Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

À présent, voyons un peu ce que crachent les volcans. Le musée présente toute une riche collection de productions volcaniques, principalement de Nisyros, mais aussi d’autres volcans de l’arc volcanique représenté plus haut pour illustrer aussi ce qui n’a pas été produit sur place. Nous commençons par des morceaux de lave. Ma première photo montre un fragment d’une coulée de rhyolite de Nisyros, tandis que la seconde représente un morceau d’andésite qui s’est pliée et chiffonnée; elle provient de Santorin et le musée la date: quarante mille ans.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Nous avons dit que les volcans vomissaient de la lave, des gaz et des cendres. Sur ma photo ci-dessus, c’est une chute de cendres rhyolitiques de Nisyros.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014
Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

La lave en fusion, les cendres, les gaz sous haute pression, arrachent des morceaux de roches solides, et les projettent au loin. Ce sont les “bombes”. Lorsque nous sommes allés voir de près, avec un guide, le cratère du Stromboli en activité (voir mon article Stromboli. Mercredi 22 septembre 2010), le guide nous a montré un chemin sur le volcan, disant que là, la semaine précédente, était retombée une bombe de vingt kilogrammes. Si on la reçoit sur la tête, cela risque de faire une grosse bosse!!! Mes deux photos montrent des bombes volcaniques d’andésite, toutes deux de Nisyros.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Parmi les autres résidus des éruptions volcaniques, il y a des scories telles que celle de ma photo ci-dessus. Quand je vois des roches rouges, j’ai tendance à dire “ah, ne serait-ce pas du porphyre?” alors que cela peut fort bien être des scories… Être géologue, c’est un métier hautement spécialisé.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014
Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014
Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Parmi les produits des volcans, il y a particulièrement les pierres ponces. Sur ma première photo, c’est une pierre ponce telle qu’on en voit couramment en parapharmacie. Celle de ma seconde photo, le musée l’appelle “pierre ponce grise” en anglais, et “pierre ponce cendrée” en grec. Une autre espèce, donc. Quant à ma troisième photo, elle représente une pierre ponce sous-marine, et cela justifie une apparence très différente. Et pour elle, on nous donne un âge, cinquante mille ans, et une origine, Gyali.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Cette pierre volcanique, on la connaît bien et on l’identifie facilement, c’est du granite. Ah oui, granite, avec un E à la fin, parce qu’il s’agit de la pierre volcanique. Lorsqu’il s’agit du bloc que va travailler le marbrier, alors c’est du granit sans E final. La plupart des réformes de l’orthographe, je ne les approuve pas parce qu’elles font disparaître la logique du mot; si l’on supprime l’accent circonflexe du O de hôpital, qui représente un S disparu, alors on ne comprend plus pourquoi l’adjectif hospitalier a un S. Mais là, cette distinction entre granite et granit, avec une prononciation strictement identique dans les deux cas et une étymologie à cent pour cent commune, elle n’a aucun sens, et j’estime que ce serait une réforme orthographique utile et logique.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Une autre pierre volcanique très connue est le basalte, comme le bloc de ma photo. Dans les régions volcaniques, on voit partout des bâtiments faits de pierre noire, ce sont des pierres de basalte. Même si elles n’ont pas cet aspect de ma photo, car celui-ci s’est solidifié en enfermant beaucoup de bulles de gaz, et aussi parce qu’une pierre taillée n’a pas la même apparence qu’une pierre brute.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014
Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Les deux pierres ci-dessus sont des obsidiennes, la première de Gyali, la seconde de Milos. Leur apparence est très différente, je ne sais si cela tient à leur lieu d’origine, mais cela tient sûrement, ou sûrement aussi, à leur âge, car celle de Gyali a vingt-cinq mille ans, et celle de Milos un million et cent mille ans. Certes, à cette époque, on ne pensait pas encore à cette jeune Vénus de Milo, qui marchait sur ces obsidiennes et qui n’a aujourd’hui qu’un peu plus de deux mille cent ans… un bébé!

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014
Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Des milliers d’années, ou même des millions d’années: il y avait déjà de la vie sur terre, et ces rejets volcaniques ont enfermé des êtres vivants. Sous les cendres volcaniques de Pompéi, crachées par le Vésuve il y a moins de 2000 ans (en 79 de notre ère), on a trouvé des corps humains et animaux figés dans la position où ils étaient quand la mort les a saisis. Les millénaires se sont accumulés sur les coquillages de mes photos ci-dessus, et eux ont été fossilisés dans la lave volcanique. On ne nous dit pas de quand ils datent, en revanche il est dit qu’ils proviennent de l’île de Milos.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

De la même façon que les coquillages de mes photos précédentes, ces feuilles d’olivier ont été fossilisées dans la cendre volcanique. Pas de datation non plus, mais une provenance, elles sont locales, elles sont de Nisyros. Je trouve leur aspect incroyable, on dirait qu’elles viennent d’être cueillies sur un arbre!

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Tout cela a amené le musée à présenter sous forme de tableau synthétique les grandes étapes de la naissance et de l’évolution de la vie sur terre. Même si, réduit, ce tableau devient illisible, je le publie pour montrer comme il est bien fait. En abscisse, on voit sous forme de petits dessins schématiques les différentes formes de vie, depuis les premières bactéries archaïques jusqu’aux plantes, aux champignons et aux animaux, tandis qu’en ordonnée ce sont les millions d’années. Sur la courbe, un point noir permet de voir la date (approximative) d’apparition de cette forme de vie.

 

Quatre milliards et demi d’années, origine de la terre. Sur l’axe des ordonnées, c’est-à-dire l’axe vertical, avant le début de tracé de la courbe, vers quatre milliards d’années (4000 millions), il est dit “origine de la vie”. Le premier point sur la courbe marque la première évidence chimique d’eucaryotes. Deuxième point, l’oxygène produit par les cyanobactéries commence à apparaître dans l’atmosphère. Au troisième et au quatrième points, les plus anciens fossiles d’eucaryotes et les premiers eucaryotes multicellulaires. Le cinquième point, qui correspond à deux emplacements sur l’axe des abscisses, marque l’apparition des plantes, mais au même niveau sur l’axe des ordonnées on signale les plus anciens fossiles animaux. Au sixième point, cinq cents millions d’années, les sols sont colonisés par les plantes, et les champignons vivant en symbiose avec elles. Au dernier point correspondent l’extinction des dinosaures et les premiers humains.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Concernant la vie, après avoir expliqué son apparition et son développement jusqu’à nos jours, le musée expose cette affiche détaillant la biodiversité de Nisyros, spécifique du fait de la nature de ses sols volcaniques, mais aussi de sa position géographique. Je ne vais pas détailler ici toute cette affiche, mais seulement sa flore riche de quatre cent cinquante espèces, et sa faune de quatre-vingt-cinq espèces d’oiseaux et de sept espèces de reptiles. Sans oublier le monachus monachus, nom latin savant du phoque moine de Méditerranée. Au centre de l’affiche, au moyen de taches de couleur, les aires d’extension de divers végétaux sont représentées. On reconnaît aussi, au nord, nord-est de Nisyros, la forme caractéristique de l’île de Gyali, avec ses deux ailes réunies par un étroit isthme; là se trouvent deux zones de pinus brutia (pin de Calabre). Sur Nisyros, la grande zone à l’est est peuplée de quercus ithaburensis (chêne du mont Thabor), l’autre grande zone qui la prolonge n’est faite que de taillis nains.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Revenons au volcanisme. Le schéma ci-dessus montre le système hydrothermal sur une coupe de la caldera de Nisyros. Lors du creusement de puits géothermiques en 1983 et 1984, on a mis en évidence que la base du volcan repose à une profondeur de trois cents mètres sur le socle mésozoïque. Les gaz des fumerolles proviennent en majorité d’un terrain aquifère situé à une profondeur de 1000 à 2000 mètres à une température de 320 à 360 degrés. Même si le volcan a cessé son activité il y a vingt à vingt-cinq mille ans, il y a encore aujourd’hui à grande profondeur, entre trois mille et huit mille mètres, une grande quantité de magma en fusion et de roches brûlantes, qui ont provoqué en 1873 et 1888 de très violents tremblements de terre et des explosions créant de nouveaux cratères dans l’ancienne caldera. C’est pourquoi il semble inévitable que ce type d’événement se reproduise.

Nisyros 06, le musée du volcan. Le 13 septembre 2014

Et puisque l’activité volcanique se poursuit à Nisyros, et bien entendu aussi dans d’autres régions du globe, nous terminons avec ce dessin schématique des risques liés aux éruptions. Généralement, les coulées de lave ne causent pas de dommages directs aux vie humaines parce qu’elles sont très lentes et laissent le temps d’évacuer les lieux. En revanche, elles détruisent complètement tout ce qui se trouve sur leur passage.

 

Les nuages de cendres incandescentes se déplacent à grande vitesse et détruisent toute trace de vie sur leur passage. Les éruptions sous-marines, comme les tremblements de terre sous-marins ou le contact de flots de lave dans la mer, provoquent des raz de marées (tsunamis), soit une vague gigantesque qui cause de très grands dégâts sur les zones côtières. La chute des cendres dans les environs du volcan provoque des asphyxies (c’est ainsi qu’est mort le naturaliste romain Pline l’Ancien du fait de l’éruption du Vésuve. Au sujet de sa mort, voir mon article Pompéi. Samedi 24 et dimanche 25 avril 2010), et l’effondrement des bâtiments.

 

Les cendres fines se déplacent dans l’atmosphère sur de grandes distances et causent des dommages à la flore et à la faune. Quant aux coulées de boue, elles entraînent de nouveaux dépôts de cendres et sont aussi la cause de très sérieuses destructions.

 

Tout cela ne donne qu’un petit aperçu de ce beau musée. Je crois que si l’on a la chance de pouvoir se rendre à Nisyros et si l’on a aimé le spectacle du volcan Stéfanos, de ses eaux bouillonnantes, de ses roches de diverses couleurs, il est indispensable de se rendre au musée du volcan à Nikeia pour mieux comprendre ce que l’on a vu.

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13 octobre 2017 5 13 /10 /octobre /2017 23:55
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Ce qui fait l’attraction principale de Nisyros, c’est son volcan. De Cos, des excursions de la journée sont organisées, petit tour dans une ville, trajet vers le volcan, retour au port et on se réembarque. Et il est bien vrai qu’il est spectaculaire, ce volcan. Ou plutôt ces volcans, car il y a deux cratères, le grand nommé Stéfanos, et le petit nommé de façon très originale Mikro (=Petit) Stéfanos.

 

On vous donne sur Nisyros un petit document de 12 pages illustré de bonnes photos, dont il existe des versions en grec, en anglais, en français, en allemand, en russe…  Et les textes en sont instructifs. Je voudrais en citer ici quelques lignes significatives: “Ce qui caractérise la deuxième explosion catastrophique de Nisyros, il y a environ quinze mille ans, c’est l’éruption de vingt milliards de mètres cubes de pierre ponce et de cendre, couvrant Nisyros, soit comme une pluie du ciel, soit comme des nuages épais incandescents de gaz et de cendre”. Ces quelques mots laissent imaginer le paysage qui résulte d’une telle explosion. Aujourd’hui, le volcan ne vomit plus de lave et sa dernière explosion remonte loin, mais il n’est pas éteint. Quand on se promène dans les volcans d’Auvergne, les paysages sont magnifiques (j’adore cette région), les volcans ont conservé leurs formes de cônes et de cratères, mais on n’y détecte pas la moindre activité, tandis qu’ici, comme nous allons le voir tout à l’heure, la nature n’est pas calme, le volcanisme se manifeste.

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Des pentes du volcan, on distingue parfaitement Stéfanos, et derrière lui sur la gauche Mikro Stéfanos dont le volcanisme n’est pas discernable, et où poussent quelques plantes: sur ces photos, dans ce tout petit cratère, on aperçoit vaguement un peu de verdure. Je montrerai tout à l’heure plus clairement son intérieur.

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Mais le grand Stéfanos, lui, est impressionnant. Avec son diamètre qui atteint trois cent trente mètres, il est, paraît-il, le plus grand cratère hydrothermal du monde… Hydrothermal, car entre un et deux kilomètres de profondeur, une eau à soixante-quinze pour cent d’origine magmatique, les vingt-cinq pour cent restants étant de l’eau de mer, est à une température de 320 à 360 degrés Celsius. Mais si en surface, au fond de la caldera, elle n’est plus qu’à cent degrés, en grande profondeur au contact des roches surchauffées et des gaz brûlants, elle atteint presque les cinq cents degrés. Ce grand Stéfanos a été formé par une explosion hydrothermale il y a environ soixante mille ans.

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

J’ai annoncé que je montrerais mieux Mikro Stéfanos, le voilà. Il est petit, certes, mais il est bien formé, bien défini. Et sur ces photos, on voit les broussailles dont je parlais. Il est cependant clair que le sol en est aride et que l’on n’y récolterait pas du blé! Il est appelé “petit”, mais comme on voit sa taille n’est cependant pas négligeable.

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Plus d’émission de lave depuis des milliers d’années, mais il y a encore des explosions hydrothermales provoquées par la pression qui monte sans cesse parce que les roches empêchent les gaz et l’eau de sortir, jusqu’à ce que cette pression finisse par faire exploser le “bouchon” de roches; Ces explosions s’accompagnent de forts séismes. Deux cratères ont ainsi été créés par une explosion de 1873, et un lors de la dernière explosion hydrothermale de Nisyros en 1887. Ma photo ci-dessus montre l’un de ces cratères nouveaux, je ne sais pas lequel. Il y a donc moins d’un siècle et demi, ce n’est rien à l’échelle des temps géologiques, il est donc possible, sinon vraisemblable que demain, ou dans dix ans, ou dans cent ans de nouvelles explosions aient lieu et que de nouveaux cratères se forment.

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Il faut remonter à la période comprise entre trente mille et quinze mille ans pour situer les émissions de lave. Ce sont elles qui ont créé, entre autres, ces deux collines. Ma première photo montre comment elles se situent l’une par rapport à l’autre, puis je montre la plus haute (698 mètres) qui est celle du Prophète Élie avec au sommet l’église qui porte le même nom, et enfin ma troisième photo représente la colline sur laquelle s’est construite la petite ville de Nikeia qui était l’objet de mon article Nisyros 02.

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Et encore cette photo pour montrer le paysage façonné par le volcan, ses dépôts de lave, ses cratères, les failles provoquées lors des séismes, un paysage dramatique mais d’une sauvage beauté. Et déjà, sur ces photos d’un peu loin, on se rend compte que la pierre et la terre sont de couleurs diverses et surprenantes.

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Il nous arrive souvent de traquer les couchers de soleil sur la mer, même si je ne publie pas à chaque fois mes photos, mais sur le volcan aussi, le coucher de soleil est magique. Sur ma photo, il est presque banal, mais il faut le vivre! Je ne peux pas faire partager autrement mes émotions à mes lecteurs, mais je suis conscient qu’il y a la même différence que lorsque l’on regarde une belle statue en photo dans un livre d’art, la Vénus de Milo par exemple, et quand, un jour, on débarque au Louvre et que l’on voit la statue  elle-même, on ressent alors une émotion très forte, qui n’a rien de commun, ou presque, avec le plaisir esthétique beaucoup plus intellectuel que l’on avait précédemment devant le livre. Oh, ma pauvre photo de ce coucher de soleil…

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Revenons à la lumière et regardons les sols. Un géologue expliquerait tout ce que l’on voit, ce dont je suis incapable. Je ne sais pas identifier les roches. Mais même sans mettre de nom sur chacune, il n’est pas interdit de s’extasier devant ce travail de la nature!

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Ici il n’est pas nécessaire d’être spécialiste pour comprendre que ce sol s’est craquelé en séchant. Et si c’est en séchant, c’est une lapalissade de dire qu’il a été humide. Or ce n’est pas une pluie, même une pluie d’orage, qui a suffisamment détrempé le sol pour en faire de la boue qui va se craqueler en séchant. Conclusion, ce sont des eaux hydrothermales qui se sont répandues et qui sont à l’origine de ce sol.

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Sur le sol, dans la roche, un peu partout et sous toutes les formes, on voit ce jaune caractéristique du soufre. Et d’ailleurs, même si on ne le voyait pas, on le sentirait. Sur ma dernière photo ci-dessus, il semble apparaître au milieu de la neige. Non, nous sommes en septembre, et sous cette latitude il fait très chaud encore, pas question de neige. Je ne sais pas ce qu’est cette substance blanche à laquelle le soufre est mêlé. Tellement mêlé, même, que je suppose que ces deux substances chimiques ont été transportées vers la surface par les mêmes eaux.

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Extrêmement surprenante est cette roche rouge. Parce que je n’y connais rien en pétrographie et en géologie, je dirais, en pensant par exemple à la Colonne Brûlée d’Istanbul ou au sarcophage de Théodoric à Ravenne, que c’est peut-être du porphyre rouge… car je crois savoir que le porphyre est une roche volcanique, alors pourquoi n’en serait-ce pas? À moins que ce ne soient des scories?

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Tout à l’heure, je parlais d’eaux venant du sous-sol et qui, en séchant, ont laissé des craquelures. Ici cette mare boueuse ne peut que provenir de l’hydrothermalisme car il n’a pas plu sur Nisyros depuis longtemps, et aucune rivière, aucun ruisseau de surface ne coule dans ce cratère. Sur la droite de la première photo, on aperçoit ce que je montre en plus gros plan sur la seconde photo, des trous dans le sol boueux. Il s’agit de ne pas s’avancer trop près, de très fins piquets à peine discernables sur ma photo signalent le danger, car le sol est très instable, chaud et acide. Par ces trous, s’échappent des gaz. Chaque jour, ce sont soixante-huit tonnes de dioxyde de carbone CO2 qui sont relâchées dans l’atmosphère par l’ensemble des volcans de Nisyros. Soixante-huit tonnes! À titre de comparaison, je recherche sur Internet l’émission de CO2 d’une voiture de taille moyenne, par exemple une Peugeot 308 essence, moteur 1,2 litre, et je trouve, selon la configuration, des rejets variant de 95 à 119 grammes par kilomètre. Dans la journée, supposons un trajet Paris-Toulouse, viamichelin.fr me donne 677 kilomètres; à raison par exemple de 115 grammes par kilomètres cette voiture polluera de près de soixante-dix-huit kilogrammes. Il faudra quand même qu’une écurie de 873 voitures effectuent ce trajet le même jour pour polluer autant que Nisyros. Et en comparant la superficie de Nisyros (41,4 km²) avec celle de la France métropolitaine (551,8 km²), ce sont 11637 Peugeot 308 essence qui vont faire le trajet Paris-Toulouse chaque jour. Oui, je sais, il y a en France beaucoup plus de kilomètres parcourus chaque jour, et avec des voitures plus polluantes que celle de mon exemple, mais je voulais seulement montrer que l’émission de CO2 dans des proportions non négligeables était également due à la nature elle-même.

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Et ici c’est la même chose, de petits trous laissant échapper des gaz, mais ils se trouvent au fond d’une dépression plus grande. Sans doute y a-t-il eu des fumerolles, mais je n’en ai pas vu. Ces fumerolles, est-il dit, sont des gaz sortant à environ cent degrés, riches en eau, mais aussi en dioxyde de carbone CO2, en sulfure d’hydrogène H2S, en hydrogène simple H2, en méthane CH4.

Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 05, le volcan Stéfanos. Les 12 et 13 septembre 2014

Ce que l’on voit ici est spectaculaire, parce qu’il se passe quelque chose sous nos yeux. Cette boue bouillonnante est à environ cent degrés, et elle est très acide, avec un pH variant entre 1,5 et 3,0. Le pH neutre étant de 7 entre le plus acide 0 et le plus basique 14, de nouveau, je vais user de comparaison: le pH du jus de citron est compris entre 2,4 et 2,6 ce qui permet de se rendre compte que ces émanations sont très acides. Comme, en outre, le sol est très instable aux alentours de ces mares de boue bouillonnante, on comprend qu’il est préférable d’être prudent et de ne pas trop s’en approcher pour éviter de glisser et d’y tomber.

 

Voilà donc quelques images de ce passionnant volcan, si beau, et quelques petites données, très petites, à la mesure de mes compétences! Mais nous avons visité le musée du volcan à Nikeia, et ce sera le sujet de mon prochain article.

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11 octobre 2017 3 11 /10 /octobre /2017 23:55
Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014
Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014

Quand on est dans la petite ville de Mandraki, la capitale de l’île de Nisyros, on voit une énorme roche de trente mètres de haut surmontée de vieilles murailles de pierre au sein desquelles se dresse une construction d’un blanc éclatant sur le ciel bleu. C’est le château que les Chevaliers de Saint-Jean ont construit au treizième siècle après leur prise de possession de l’île, et un monastère qui s’est installé par la suite dans ses murs. C’est vers ce monastère que nous allons monter aujourd’hui.

 

C’est le monastère de la Panagia Spiliani, la Vierge de la Caverne, parfois appelé brièvement (comme peint sur sa façade) monastère Spiliani (monastère de Celle-de-la-Caverne). Il s’agit de l’orthographe phonétique correspondant à l’actuelle prononciation du grec, mais si l’on sait que la prononciation antique aurait été Spélianè, on fait tout de suite le rapprochement avec les mots spéléologue, spéléologie, en rapport avec les cavernes, les grottes, toutes les cavités au sein de la terre. Le monastère porte ce nom parce que sa plus grande partie est située dans une grotte, ou une caverne.

Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014
Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014
Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014

Le monastère possède à la fois les constructions au sommet, et ces petites constructions au bas de la roche. Ce que je sais, c’est que le monastère a été construit “au-dessus” d’une certaine grotte, qui est au sommet. Ici derrière cette arche de pierre, ce n’est donc pas la grotte en question, et je ne sais pas quelle est la signification de cette arche et de cette petite chapelle.

 

Car voici ce que l’on raconte au sujet de la grotte dont on qualifie le nom de la Vierge et qui est à l’origine de ce monastère: Un jour, vers l’an 1400, un paysan découvre l’accès d’une grotte aux environs du village de pêcheurs de Pali (Πάλοι), à quelque distance de Mandraki, en plein nord de l’île, il y pénètre et, oh surprise, il y trouve une icône de la Vierge. Qu’est-ce qu’elle peut bien faire là? Il la prend et la porte à l’église de la Panagia Potamitissa (Παναγία Ποταμήτισσα, la Vierge du Fleuve), dans la partie sud de Mandraki, où elle semble beaucoup plus à sa place. Mais le lendemain, l’icône avait disparu. On l’a crue volée. Le temps passe. Un jour, quelqu’un pénètre dans une autre grotte, non plus à Pali mais à Mandraki, au sommet de cette roche, et tombe par hasard sur l’icône. Sans comprendre comment elle se trouve là, il la récupère et la reporte à l’église. Et pour la seconde fois l’icône disparaît et est retrouvée dans cette cavité au sommet de la roche. Quand, une troisième fois, le scénario se reproduit, on comprend que c’est la volonté de la Vierge que son icône soit en ce lieu, on l’y laisse et l’on y construit une chapelle. Ce n’est que vers 1600 que l’on construit le monastère vers lequel nous allons monter.

Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014

Pour grimper tout au sommet de cette roche, le chemin est bien pavé. Il zigzague, monte des marches; je ne les ai pas comptées, mais je lis qu’il y en aurait 270. Je le mets au conditionnel, parce que j’ai un gros doute. En effet, en divisant les trente mètres par deux cent soixante-dix, c’est-à-dire sans même tenir compte des endroits où la ruelle est en pente, chaque marche ne ferait qu’un peu plus de onze centimètres de haut, ce qui n’est pas le cas… Cela n’empêche pas le trajet d’être très pittoresque et de découvrir de superbes vues.

Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014
Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014
Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014

Et aussi, ici ou là, on passe par des lieux très originaux, comme ce petit réduit, avec sa grosse porte basse, cette accumulation de casseroles et batterie de cuisine, ou encore cette icône de mosaïque qui représente une sainte auréolée, peut-être la Vierge.

Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014

Enfin, on arrive au terme de l’ascension. Encore une volée de marches, et cette noble entrée du monastère apparaît sur fond de ciel, entre le drapeau de l’Église orthodoxe grecque, avec son aigle bicéphale sur fond d’or, et le drapeau de la Grèce indépendante bleu et blanc

Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014
Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014

Nous avons vu, dans mes deux premiers articles sur l’île de Nisyros, avec quel goût et quel soin les sols étaient artistement ornés de dessins réalisés avec des pierres de couleur disposées de chant. Cela se retrouve à l’entrée du monastère avec l’aigle bicéphale. On franchit la porte, et de l’autre côté la même technique représente deux paons s’abreuvant à un calice.

Nisyros 04, monastère de la Panagia Spiliani. Vendredi 12 septembre 2014

Je n’en montrerai pas plus parce que dès lors que l’on a passé ce premier hall d’accueil la photo est interdite. Et d’ailleurs, on n’est pas admis à visiter grand-chose dans le monastère. Je ne sais si, étant orthodoxe, j’aurais été admis à en voir plus, car cette Vierge Spiliani a été choisie pour être la patronne et la protectrice de l’île; mais je ne suis pas orthodoxe. Demi-tour. Culturellement, donc, cette visite n’apporte presque rien, mais sur le plan touristique l’ascension vaut la peine, c’est une splendide promenade.

 

Nous sommes à Nisyros à la mi-septembre. Un mois trop tard pour assister aux célébrations du 15 août, la Κοίμηση της Θεοτόκου (Kimisi tis Théotokou, la Dormition de la Mère de Dieu). Dommage. Il paraît que les célébrations, instaurées il y a environ un siècle, durent neuf jours, du 6 au 15 du mois, et que les femmes qui en font le pèlerinage, appelées les Νιαμερίτισσες (Niaméritisses, les “Femmes des Neuf Jours”), doivent respecter durant tout ce temps un jeûne très strict et effectuer à genoux trois cents prosternations chacun de ces jours, chantant à chaque prosternation les Lamentations de Marie Pleine de Grâce.

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9 octobre 2017 1 09 /10 /octobre /2017 23:55
Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014

La visite de l’acropole antique de Nisyros va être assez rapide, parce qu’il ne reste pratiquement rien de la ville antique. En revanche, les murailles sont particulièrement bien conservées.

Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014

Entrons. La ville était habitée au moins depuis le septième siècle avant Jésus-Christ, cela est prouvé par les objets trouvés dans les tombes du cimetière proche; mais de puissantes murailles ont été édifiées au cours du quatrième siècle pour la protéger. Elles entouraient l’acropole, où nous sommes à présent, mais descendaient jusqu’au bord de la falaise et englobaient la roche où se trouvent aujourd’hui les ruines du kastro des Chevaliers de Saint-Jean et le monastère de la Panagia Spiliani. En ce quatrième siècle avant Jésus-Christ, Mausole, le roi de Carie en Asie Mineure (pour qui un superbe tombeau a été construit à Halicarnasse, aujourd’hui Bodrum, tombeau appelé “mausolée” du nom de son destinataire, l’une des sept merveilles du monde), est parvenu à conquérir Rhodes, Cos et les îles du voisinage, dont Nisyros. Lui et ses successeurs s’y sont maintenus de 355 à 332 et il est possible, sinon probable, que ces murs soient leur œuvre.

Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014

Ce que nous voyons ici, c’est l’intérieur des murs. On distingue d’ailleurs, au premier plan, l’escalier de ma photo précédente, vu dans l’autre sens. J’y ajoute un schéma de la muraille représenté sur le site. Cette muraille, dont l’épaisseur varie entre deux mètres et trois mètres soixante-cinq, est l’une des fortifications de l’époque classique les mieux conservées. On voit la qualité et les dimensions imposantes de ces beaux blocs trapézoïdaux taillés dans l’andésite basaltique, très noire, du volcan local.

 

C’est à l’intérieur des murs que se situait le cœur névralgique de la cité, bâtiments publics et temples, là où le terrain est plat au sommet de la colline. Les maisons d’habitation privée, elles, se situaient vraisemblablement au bas des pentes de l’acropole, mais comme je le disais au début les murs descendaient vers la mer pour les protéger elles aussi. En me promenant dans tout ce secteur, nulle part je n’ai vu de restes de constructions, hormis ces murailles. Ni temple, ni maison. Peut-être n’ai-je pas été assez attentif, mais les panneaux explicatifs sur le site, avec des expressions comme “would have been located on the flat top of the hill”, pour les bâtiments publics, et “must have been built down the slopes”, pour les habitations, expriment des suppositions, des hypothèses. C’est la même chose dans le texte grec, avec les expressions θα είχαν ainsi que πρέπει να ήταν… S’il y a doute, c’est que l’on n’a pas retrouvé de preuves, donc de fondations ou autres.

Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014

Trois escaliers ont été dégagés lors des travaux archéologiques. Celui que j’ai montré précédemment et qui apparaît encore sur la photo ci-dessus est encore en très bon état et, si j’ai bien compris, il n’a fait l’objet de travaux de restauration que très légèrement, sans qu’il soit besoin de le reconstruire avec des matériaux nouveaux. Bien entendu, j’ai eu envie de l’emprunter pour voir comment est le dessus du mur. Le chemin de ronde est très irrégulier, mais de là-haut on a une vue splendide, à la fois sur l’acropole, sur la ville moderne et sur la mer. J’ai publié dans mon premier article sur Nisyros les vues sur la ville et la mer que j’ai prises du haut des remparts.

Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014

La porte par laquelle nous sommes entrés sur le site n’était pas une porte de la ville, ce n’était pas une porte dans les remparts. En fait, je ne sais pas trop ce qu’était cette porte, car elle est indiscutablement antique, or je lis, devant la porte de mes photos ci-dessus, que c’est la seule porte ouvrant dans le mur qui ait survécu. Placée, comme on le voit, dans un retour du mur, elle était quasiment invisible de l’ennemi éventuel. En outre, elle fait face à la tour d’angle, d’où les soldats pouvaient aisément tirer des flèches et lancer des javelots sur les assaillants. Les deux mètres dix de large et trois mètres vingt de haut de cette ouverture étaient fermés par une double porte de bois épais, renforcée côté intérieur d’une barre transversale que l’on glissait dans un trou du mur. Ce trou carré est bien visible dans le mur de gauche, mais sur ma seconde photo ci-dessus une fois réduite à la dimension de ce blog, on ne le discerne plus. J’ai eu la sottise de ne pas le photographier en gros plan.

Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014

Des tours carrées ont été construites également, massives jusqu’au niveau du chemin de ronde, pour renforcer le système de défense; j'ai d'ailleurs fait allusion à une tour qui se trouve face à l'entrée pour la protéger.  Le mur, on est dessus et vulnérable, ou on est derrière et on ne fait qu’attendre que l’ennemi l’ait escaladé. La tour, on est relativement protégé à l’intérieur, on y est en position d’observer la progression et les manœuvres de l’ennemi, et l’on y est en  mesure de le combattre et de tenter de l’empêcher d’escalader le mur. Huit de ces tours, dans des états de conservation divers, existent encore aujourd’hui, six au sud et deux à l’est.

 

Dans l’une des tours, est gravée une inscription qui dit: ΔΑΜΟΣΙΟΝ ΤΟ ΧΩΡΙΟΝ ΠΕΝΤΕ ΠΟΔΕΣ ΑΠΟ ΤΟ ΤΕΙΧΕ[ΟΣ]. C’est du dialecte dorien, car ce secteur de la mer Égée, de Cos à Rhodes en passant par la péninsule de Cnide, Gyali et Nisyros, est peuplé de Doriens. Ainsi, le δάμος (damos) de Nisyros, c’est le δήμος (dêmos) d’Athènes. Cette inscription signifie: “cet emplacement appartient à l’État, sur cinq pieds à partir du mur”, ce qui veut dire que l’espace doit être laissé libre en permanence sur une distance d’environ un mètre cinquante du mur. Il s’agit, bien sûr, que les défenseurs puissent à tout moment accéder sans gêne en cas de danger.

 

Je disais plus haut que ces murs avaient probablement été construits à l’époque où Mausole et ses successeurs avaient occupé l’île. L’analyse épigraphique de cette inscription permet de la dater, avec certitude, entre 350 et 325 avant Jésus-Christ. Or ces dates correspondent en gros à l’occupation carienne, d’où la forte probabilité que les murailles leur soient dues.

Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014

En arrivant au bout de la partie du mur encore debout et restaurée, on voit ces murs de soutènement faits d’énormes roches, à moins qu’ils n’aient été directement taillés dans la falaise. Les panneaux explicatifs, clairs et complets, que l’on trouve dans les environs du mur sont ici complètement absents. Le terrain ainsi maintenu est à peu près plat, il devait s’y trouver des constructions. Je disais que les archéologues ne disposaient pas d’informations précises sur ces constructions, faute de restes, mais je suppose qu’ils doivent avoir quelque chose à dire sur ces murs de soutènement, …quelque chose qu’ils ne disent pas!

Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014

Quoique je n’aie pas lu d’explication au sujet de ce mur, il est aisé de comprendre ce que sont ces trous dans la pierre à distances régulières les uns des autres. Ils signifient que des poutres s’y appuyaient, pour soutenir le sol d’un étage, à moins que ce ne soit le toit d’un préau. Si c’était un étage, il y avait un autre mur en face, la pièce devait être fermée. Si c’était un préau, on peut imaginer en face une rangée de colonnes, comme une courte stoa, les poutres reposant sur l’entablement.

Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014

Ces chapiteaux corinthiens proviennent des colonnes d’une grande basilique paléochrétienne du sixième siècle. La taille de cette basilique prouve que la religion nouvelle était bien implantée à Nisyros à cette époque. Elle date d’un millénaire après la construction de la muraille, et constitue la seule trace d’occupation des lieux subsistant à ce jour. Je trouve cela très bizarre.

Nisyros 03, l’acropole antique. Samedi 13 septembre 2014

Aujourd’hui encore, l’acropole de Nisyros est habitée, comme on le voit, mais ces habitants sont très timides, ils fuient dès qu’on les approche, et se réfugient dans ces remparts qui continuent donc d’assurer leur rôle de protection de la population. Même si la population n’est plus la même!

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7 octobre 2017 6 07 /10 /octobre /2017 23:55
Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014

La “province” de Nisyros est, comme sa “capitale” Mandraki, pleine de charme et de naturel. Comme nous ne sommes passés qu’assez rapidement dans la plupart des bourgs de Nisyros, je vais centrer cette province sur Nikeia (ou, phonétiquement, Nikia), qui surplombe le volcan, et où nous avons passé un  petit moment en attendant de nous rendre à la fête religieuse qui sera le sujet de mon article Nisyros 07.

 

Comme dans toutes ces îles, les ruelles sont étroites, à la fois pour se protéger des rayons du soleil et par manque d’espace pour construire la ville. Les deux photos ci-dessus sont presque identiques, à part le fait que la seconde se trouve à une entrée, comme on peut le constater en voyant sur la gauche cette massive porte.

Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014

Beaucoup plus originales sont ces rues. Non pas parce qu’elles gravissent des marches, puisque la presque totalité de la Grèce, îles et continent, est constituée de montagnes; il faut bien construire sur les pentes. Mais ces arches de pierre qui enjambent les ruelles, quand ce ne sont pas des pergolas, c’est typique du lieu, et cela donne envie de se balader au hasard.

Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014

Au décor de la ville, j’ajoute cette porte. C’est une maison toute simple, mais on a encadré la porte avec des pierres de basalte (hé oui, on est sur un volcan), et pas avec un banal rectangle, mais avec cette élégante arche.

Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014

La ville s’est construite en hauteur, sur le rebord du volcan, mais elle est surplombée par plusieurs sommets rocheux, dont celui de ma photo, et tout là-haut est allée se jucher une petite église toute blanche. C’est l’église du Prophète Élie (ναός Προφήτη Ηλία).

Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014

Nous passions dans une rue où poussaient quelques plantes ornementales près du mur, quand je vois soudain sur une feuille un insecte inconnu de moi et richement vêtu de pourpre et d’or. Sans doute, ma foi, un rescapé de la cour des empereurs byzantins. Arguant de son droit à l’image, il voletait sans cesse, probablement dans le but de m’empêcher de le prendre en photo. Mais après un long moment de patience, j’ai enfin réussi à le surprendre. Pour mes lecteurs c’est sans doute banal et sans intérêt, mais cet animal singulier m’a frappé.

Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014

Nous arrivons sur cette place centrale. Je me répète, si je dis encore une fois le charme des lieux, mais comment faire autrement? Cette jolie petite place, nommée “Porta” (la Porte) quoiqu’il ne s’y trouve pas de porte, s’aligne sur la tradition de l’île en revêtant son sol de “calades”. Ici ce ne sont pas de délicats dessins floraux, l’artiste a voulu donner au lieu de l’importance, de la majesté en traçant d’imposantes figures géométriques. L’après-midi est déjà assez avancé, et… nous avons oublié de déjeuner. Nous nous asseyons à une table qu’un kafeneio (le καφενείο est un genre de café typiquement grec) a placées en terrasse, pour casser une petite croûte. Ce sera aussi agréable que le décor que nous avons sous les yeux.

Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014

Rapprochons-nous du fond de la place avec son église en haut des marches. Sur la droite, au-dessus de cette haute ouverture, est sculptée cette tête de lion. Et puis, sans être exceptionnel, son clocher mérite quand même d’être vu d’un peu plus près, avec ses deux aigles.

Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014

Comme on peut l’apercevoir par cette porte ouverte, on ne pénètre pas ici dans l’église, mais dans son enceinte. Un passage, une petite cour, et l’on a accès à divers bâtiments. Nous allons maintenant pénétrer dans l’église.

Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014

Cette salle ne ressemble absolument pas au narthex habituel des églises, mais elle en fait office, c’est une sorte d’antichambre de l’église proprement dite. Sur ce pilier, une fresque moderne représente sainte Théodora. Dans cette église orthodoxe, et coiffée de cette couronne impériale, je pense qu’il n’y a aucun doute sur l’identification de cette sainte, c’est cette impératrice qui a été régente de l’Empire Byzantin de 842 à 856, surtout célèbre pour avoir convoqué en 843 le concile qui mettra définitivement fin à l’iconoclasme. Il suffit d’avoir pénétré ne fût-ce qu’une seule fois dans une église orthodoxe pour avoir constaté avec quelle piété et quelle ferveur les fidèles viennent embrasser les icônes, et pour concevoir leur soulagement quand, enfin, la représentation de Dieu et des saints n’a plus été interdite. J’ai déjà publié des photos de sa représentation à Arta au sud de l’Épire, dans l’église qui porte son nom, ainsi qu’à Ravenne, en Italie, dans l’église San Vitale.

 

Il y a certes bien d’autres saintes Théodora ou Théodore, dont une autre impératrice couronnée, la femme de l’empereur Justinien. Elle a été fort influente, mais n’a jamais régné à titre personnel (ou en tant que régente), et son nom n’a donc pas marqué d’étape importante dans l’histoire, qu’elle soit politique ou religieuse. Ces deux impératrices, je les connais bien, ainsi que, comme ancien professeur de lettres, celle de Corneille, qui a écrit une tragédie intitulée Théodore, vierge et martyre, une œuvre qui n’eut aucun succès à son époque, et qui aujourd’hui n’est guère lue, guère représentée, et pas du tout étudiée en lycée. Mais j’ai voulu vérifier qu’il ne s’agissait pas, par hasard, d’une quatrième sainte du même nom, et je suis tombé sur une certaine sainte Théodora d’Alexandrie.

 

L’hagiographie de cette sainte est curieuse. Décrite avec sobriété sur le site Nominis de l’Église catholique, elle m’a donné envie d’aller voir dans la Légende dorée de Jacques de Voragine, où cet auteur du treizième siècle fleurit généralement joliment les histoires. Théodora est une femme du temps de l’empereur Zénon (474-475 puis 476-491) vivant à Alexandrie avec un mari riche et pieux. Après avoir longtemps résisté à un séducteur, elle lui cède enfin mais très vite elle est prise de remords: “hélas! Hélas! J’ai perdu mon âme, j’ai détruit mon honneur!” et le mari, qui n'est pas au courant, ne comprend rien aux larmes de son épouse. Plus tard, elle a une idée pour se racheter: “Un jour, pendant que son mari était absent, elle se coupa les cheveux, revêtit un vêtement d’homme, et se rendit dans un couvent de moines, qui était à huit lieues d’Alexandrie. Là, elle demanda à être admise parmi les moines, et sa demande lui fut accordée. Interrogée sur son nom, elle dit qu’elle s’appelait Théodore”. Au monastère elle mène une vie sainte, de travail et de prière, et à Alexandrie son mari ignore ce qu’elle est devenue, suppose qu’elle a dû partir avec un autre homme.

 

Le temps passe. Elle est souvent chargée d’aller à Alexandrie, avec un chariot à deux bœufs, chercher de l’approvisionnement pour le monastère. “Mais un jour, comme elle revenait de la ville avec son attelage, elle reçut l’hospitalité dans une maison où une jeune fille s’approcha d’elle, et lui dit: Viens dormir avec moi! Le moine s’y étant refusé, la fille alla trouver un autre homme qui demeurait dans la maison. Et lorsque plus tard son ventre se trouva enflé et qu’on lui demanda de qui elle était enceinte, elle répondit: Du moine Théodore, qui a couché avec moi. L’enfant fut donc remis à l’abbé du monastère qui, après l’avoir placé sur les épaules de frère Théodore, accabla celui-ci de reproches et le chassa du monastère. Et pendant sept années, la sainte vécut à la porte du monastère, nourrissant l’enfant du lait du troupeau”. Enfin elle est pardonnée et réintègre sa cellule. Vient un jour où un moine l’entend, alors qu’elle est enfermée dans sa cellule avec son fils, lui dire que la fin de sa vie approche, et lui recommander de jeûner, de prier et de servir son prochain. “Ayant dit cela, Théodore rendit son âme au Seigneur et s’endormit doucement en lui. […] L’abbé courut à la cellule du moine défunt; et, en découvrant celui-ci, ils virent que c’était une femme; et l’abbé, ayant mandé le père de la jeune fille qui l’avait dénoncé, lui dit : L’amant de ta fille est mort! Puis, relevant le manteau du mort, il lui montra que c’était une femme”.

 

Telle fut la vie et la mort (en l’an 491) de cette Théodora, alias frère Théodore, justifiant sa canonisation. Cette Théodore, mariée et (très passagèrement) adultère, n’a bien évidemment rien à voir avec la vierge et martyre de Corneille, ni avec une quelconque impératrice. Et il ne peut être question d’elle, ainsi vêtue et couronnée, dans cette église. Mais sa vie rocambolesque a retenu mon attention.

Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014
Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014

Cette église est dédiée à la Présentation de la Vierge (ναός των Εισοδίων της Θεοτόκου, soit en mot à mot “église de l’entrée de celle qui a enfanté Dieu”). Il est surprenant de constater, après avoir vu, depuis la place, un bâtiment assez imposant, après avoir gravi ces marches montant vers un lieu de culte dont la surélévation domine le secteur, de se retrouver dans un espace plutôt réduit et qui ne ruisselle pas d’or et de sculptures, comme c’est souvent le cas, quoique les icônes de l’iconostase soient assez soignées (mais de petites dimensions en raison de l’exiguïté du panneau) et que la chaire, à gauche, comme le siège du métropolite, à droite, soient de belle facture.

Nisyros 02, Nikeia. Samedi 13 septembre 2014

Et voilà, c’est fini. Ce panonceau sur la porte annonce le musée ecclésiastique de l’église, mais nous sommes arrivés sur cette place en fin d’après-midi et, que nous nous soyons attablés ou non au kafeneio, nous ne pouvions qu’en trouver la porte fermée car la plupart des musées et sites de Grèce ferment à 15 heures. Je ne sais si mon petit tour, si bref, de Nikeia, justifiait un article à lui tout seul, mais comme nous nous sommes sentis bien dans cette petite ville j’ai eu envie de le dire…

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5 octobre 2017 4 05 /10 /octobre /2017 23:55
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

Venant de Cos, nous allons passer deux jours à Nisyros avant de gagner Rhodes. Deux jours seulement, mais deux jours intenses. Le ferry a quitté Cos dans la nuit de jeudi 11 à vendredi 12 à 2h50, il a accosté à Nisyros à 4h10. Un bref sommeil, et nous disposons de tout notre vendredi et de tout notre samedi pour visiter l’île, et dimanche matin départ à 9h40 pour Rhodes. Compte tenu de la nécessité de se présenter à l’embarquement bien avant l’heure du départ, nous n’aurons pas vraiment le temps de voir grand-chose ce matin. Deux jours, donc, et pas plus.

 

Ma photo ci-dessus montre Nisyros du côté de sa capitale et de son port, Mandraki. Cette vue générale, je l’ai prise alors que nous la quittions, le sillage du navire en fait foi. Je suis bien obligé de commencer par le départ, car l’arrivée s’étant faite de nuit, je n’ai pas pu prendre de photo significative de l’île.

 

Les problèmes de transcription des noms en caractères grecs dans notre alphabet, c’est ennuyeux, mais il me faut à chaque fois en parler pour que l’on puisse s’y retrouver selon le guide, la carte ou le site Internet que l’on consulte, les noms apparaissant à chaque fois sous une forme différente. En grec, c’est Νίσυρος (nom féminin, comme quasiment toutes les îles en grec). Transcrit littéralement, cela donne Nisyros. C’est l’orthographe que j’adopte. Certains, parce que le Y et le I se prononcent de la même manière, orthographient Nisiros. Mais aussi, parce que le simple S entre deux voyelles se prononce Z, en français comme en anglais, il est fréquent que dans la transcription le S soit redoublé: Nissiros ou Nissyros. Pour obtenir un maximum de résultats dans les moteurs de recherche sur Internet, il faut parfois essayer avec ces différentes orthographes.

 

L’origine de Nisyros? C’est le géographe Strabon, né vers 64 avant Jésus-Christ et mort vers 24 après, qui nous en parle, quoiqu’avec quelques doutes, dans sa Géographie (X, 5, 16). D’abord le texte grec, puis ma proposition de traduction:

 

Φασὶ δὲ τὴν Νίσυρον ἀπόθραυσμα εἶναι τῆς Κῶ, προσθέντες καὶ μῦθον, ὅτι Ποσειδῶν διώκων ἕνα τῶν γιγάντων Πολυβώτην ἀποθραύσας τῇ τριαίνῃ τρύφος τῆς Κῶ ἐπ' αὐτὸν βάλοι, καὶ γένοιτο νῆσος τὸ βληθὲν ἡ Νίσυρος ὑποκείμενον ἔχουσα ἐν αὐτῇ τὸν γίγαντα· τινὲς δὲ αὐτὸν ὑποκεῖσθαι τῇ Κῷ φασιν.

 

Ce que je traduis: “On dit que Nisyros est un fragment de Cos en se référant au mythe selon lequel Poséidon poursuivant Polybotès, l’un des géants, après avoir détaché avec son trident un morceau de Cos l’aurait jeté sur lui, et l’île de Nisyros aurait été créée de ce roc envoyé, maintenant écrasé sous elle le géant; mais certains disent qu’il est écrasé sous Cos”.

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

Le port se trouve dans la capitale de l’île, nommée Mandraki. C’est une bien petite ville, mais elle est sympathique, et elle a su ne pas se laisser transformer et défigurer par le tourisme de masse. En outre, l’accueil est des plus chaleureux. Un exemple? Lorsque nous sommes arrivés, en pleine nuit, nous n’avons pas trouvé mieux, pour finir la nuit, que de poser notre camping-car le long de la route, sur un bas-côté élargi comme un tout petit parking. Le lendemain, vendredi, supposant qu’il était difficile de se rendre au volcan avec notre lourd engin, nous avons voulu louer une voiture. Dans l’agence sur le port, nous avons été reçus par une jeune femme de façon extrêmement aimable. Elle nous a dit que pour le volcan, il n’y avait pas de problème pour nous y rendre avec le camping-car, mais que le samedi il y avait le soir une fête qui pouvait nous intéresser (nous avons causé un bon moment, elle s’intéressait à notre voyage, à notre projet et nous a posé bien des questions), et finalement nous n’avons loué la voiture que pour le samedi. Nous avons aussi demandé si elle avait une idée de l’endroit où nous pourrions passer la nuit plus commodément que sur la route, elle nous a dit que sur le port il n’y avait pas de problème, et que nous pouvions même nous connecter sur le 220 volts dans l’une des bornes qui sont prévues pour les bateaux. La Municipalité, et ses habitants, sont plus accueillants que les villes qui interdisent l’accès des camping-cars, même dans la journée et en payant leur place de parking.

 

Cette (petite) ville sympathique, je l’ai photographiée depuis l’acropole antique (dont je parlerai dans mon article Nisyros 03) qui la domine à quelque distance au sud (première photo ci-dessus), et aussi depuis la ruelle qui monte vers le monastère de la Panagia Spiliani, la Vierge de la Grotte (qui sera l’objet de mon article Nisyros 04). On la voit, toute ramassée, toute tassée, entre la mer et la montagne, incapable d’escalader cette pente abrupte, se contentant d’essaimer sa vieille citadelle et son monastère au sommet.

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

Sur cette photo, on comprend peut-être mieux la disposition de la ville. Je suis sur l’acropole antique; en promenant la souris sur l’image de Google Earth, il apparaît que je suis entre 96 et 102 mètres d’altitude. Devant moi, il y a cette énorme roche sur laquelle les Chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, installés à Rhodes et s’étant étendus à Cos, ont construit un kastro sur cette île de Nisyros située entre les deux grandes îles, et dans l’emprise du kastro écroulé on voit le blanc monastère de la Panagia Spiliani. Au pied de cette roche, c’est la ville de Mandraki, avec ses maisons blanches au toit en terrasse. Et puis le paysage de la mer est barré par une île qui, sur la gauche, s’abaisse et devient extrêmement étroite, c’est Gyali. Derrière Gyali, dans les rayons ultra-violets qui noient le lointain dans une sorte de brume, on distingue vaguement le rivage de Cos.

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

Nous n’irons pas sur cette Gyali. Je ne pourrai donc pas en montrer d’autres photos ni les commenter, c’est donc maintenant que je vais en parler. Ce n’est pas une île immense et surpeuplée, Wikipédia lui donne 10 habitants (en 2001, mais je gage qu’aujourd’hui encore on ne s’y presse pas comme dans le métro parisien aux heures de pointe, d’autant plus qu’il y avait 16 habitants au recensement de 1991). C’est une île volcanique, mais quand j’ai cherché à savoir depuis quand le volcan n’a plus craché, je trouve dans Wikipédia en français que “la dernière éruption connue sur Gyali date de l'Holocène”, c’est-à-dire une époque comprise entre 8000 avant Jésus-Christ et… ce matin! Pas très précis. Dans un livre en anglais, Israel's Exodus in Transdisciplinary Perspective (Springer 2015), au sujet de l’éruption de Santorin en 1540 avant Jésus-Christ et de pierres ponces que l’on a retrouvées là, il est dit que “all come from earlier eruptions at Nisyros and Gyali”, toutes proviennent d’éruptions antérieures, à Nisyros et à Gyali. Mais sans doute pas très antérieures, parce que Wikipédia en allemand est beaucoup plus précis que la version française: “Die letzte vulkanische Aktivität von Gyali fand laut Thermolumineszenzdatierung etwa 1460 v. Chr. statt und damit relativ zeitnah zur Minoischen Eruption der Vulkaninsel Santorin”, ce qui, si je peux me fier au traducteur (parce que je ne comprends rien à cette langue) voudrait dire qu’une étude des pierres par thermoluminescence donnerait la date de 1460 avant Jésus-Christ, soit un peu moins d’un siècle après Santorin (et non avant Santorin). Qui croire?

 

En grec, το γυαλί (to gyali) signifie le verre. L’île doit son nom à l’obsidienne d’origine volcanique qui était déjà exploitée au troisième millénaire avant Jésus-Christ sur la moitié de l’île que l’on voit sur la droite de mes photos, tandis que la moitié à gauche sur les photos est exploitée aujourd’hui très activement pour la pierre ponce. Entre ces deux moitiés, qui étaient des îles indépendantes l’une de l’autre, s’est peu à peu formé un isthme de sédiments récifaux modernes (“modern reef sediments”, dit sur son site en anglais la Smithsonian Institution américaine).

 

Il existe, de temps à autre, une navette entre Nisyros et Gyali. Il n’y en avait pas lors de notre passage. J’aurais beaucoup aimé aller faire un tour sur cette petite île, cela n’a pas été possible. Je ne peux donc ni en montrer plus, ni en dire plus que ce qui précède, et je le regrette. Revenons donc à Nisyros.

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

Quoique chaque île ait sa personnalité propre, une personnalité forte, néanmoins on retrouve ici ces maisons blanches, les portes et fenêtres bleues qui évoquent davantage les Cyclades que le Dodécanèse, ces ruelles étroites et sinueuses, ces minuscules places ombragées. Une petite ville qui est restée authentique et qui a un charme fou.

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

Et les gens ont du goût. Certains ne se contentent pas de se conformer à l’esthétique générale, mais imaginent leur propre décoration. Ainsi, parce que la rue est en pente, les propriétaires de cette maison ont imaginé de ne pas accéder à leur porte directement au haut d’un escalier, mais sur une sorte d’étroit trottoir. Et le sol de ce trottoir, qu’il est joli!

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

J’ai peut-être des goûts bizarres, je ne sais pas, mais j’ai toujours envie de photographier ce genre d’endroits, un vieil escalier de pierres usées sous une voûte, et puis au bout apparaît la vie, une porte, des pots de fleurs… Quant au panneau fixé au mur, il adopte une écriture entrelacée que j’ai eu un peu de mal à décoder; alors puisque j’ai peiné dessus, il ne faut pas que ce soit pour rien, voilà ce qui est écrit: “Cette maison a été donnée au saint monastère de la Panagia Spiliani par les héritiers des regrettés Élie et Anne Diakomichalis”.

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

Encore deux images de bâtiments vus à Mandraki, la capitale de Nisyros. Deux images opposées. Car la première, malgré ses huisseries dépeintes, est luxueuse, avec ses portes en plein cintre et ses murs en belles pierres de taille, tandis que la seconde, qui est troglodyte, semblerait complètement abandonnée si, tout au contraire, deux de ses portes n’étaient soigneusement peintes et bien entretenues. Et d’ailleurs, le gros sac posé devant la façade près de la porte d’entrée porte l’inscription δομικά υλικά, c’est-à-dire matériaux de construction. Ou bien, donc, c’est du ciment pour reconstruire quelque chose ou pour crépir la façade, ou bien ce sont des déblais avant restauration. Et, de toutes façons, ces deux maisons ont beaucoup de cachet.

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

Voilà donc pour l’architecture privée. Passons maintenant à l’architecture publique avec l’hôtel de ville. La plaque fixée au-dessus de la porte-fenêtre qui ouvre sur le balcon dit δημαρχείο 1931 (mairie, 1931). Il a donc été érigé à l’époque où l’île était, avec ses sœurs du Dodécanèse, sous domination italienne. Ce n’est d’ailleurs pas très étonnant, parce que le style n’en est pas du tout grec, son auteur en est certainement un architecte italien, quoiqu’il n’ait pas hérité des gènes de la terrible architecture mussolinienne.

 

Quant au sol de la place, encore ici de jolis dessins effectués en galets posés de chant, jouant sur l’alternance des couleurs. En Provence, on appelle cela une calade, mais je ne sais trop comment appeler cela hors de l’Occitanie, soit en langue d’oïl, soit en grec… Ce peuple a toujours été amateur d’art, et cela se voit dans chaque détail. La population totale de l’île tournant autour des 1000 habitants seulement partagée entre six agglomérations, il y a peu, je pense, de bourgs aussi petits que Mandraki à travers le monde, qui soignent autant leur esthétique.

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

Après l’architecture civile, privée ou publique, l’architecture religieuse. Comme je l’ai annoncé au début, je consacrerai un article spécifique au monastère de la Panagia Spiliani. Je n’en parlerai donc pas ici. Et je passerai rapidement sur ces petites églises qui, sans démériter, ne sont cependant pas de grand intérêt.

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

Sur l’une des photos que j’ai publiées au début du présent article, où je montre l’île de Gyali, on voit dans la nature, surplombant la mer, cette tour qui apparaît ici en plus gros plan. Je me suis demandé ce qu’elle pouvait bien être, une tour de défense datant des Chevaliers de Saint-Jean, ou le corps d’un moulin à vent qui a perdu son toit et ses ailes? Je pencherais pour la première solution, car son sommet est crénelé, ce qui indiquerait plutôt une terrasse qu’un support de toit. Mes livres n’en parlent pas, mes guides non plus, ni les sites Internet consultés, et même quand j’ai fait une recherche d’images avec “tour“ et avec “moulin”, en français ou en grec, elle n’apparaît nulle part. Elle n’intéresse donc personne que moi, à moins que ceux qui la voient et n’en trouvent pas l’explication préfèrent la passer sous silence.

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014
Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

Au sujet de Cos, j’ai évoqué la prise de possession de l’île par les Chevaliers hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, dans la foulée de leur prise de possession de l’île de Rhodes. Rhodes 1310, Nisyros et Cos 1315. Ils y resteront jusqu’à ce que les Ottomans parviennent enfin à se rendre maîtres de Rhodes où se trouvait le quartier général de l’Ordre, en 1522. Là comme ailleurs, ils ont bâti un kastro –un château– pour défendre leur île. Mais à la différence de celui de Cos (mon article Cos 05, le kastro de Neratzia) ou de celui que nous visiterons bientôt à Rhodes, il était beaucoup plus petit, et surtout il n’a pas du tout été entretenu. Aujourd’hui, il ne se visite pas, et d’autant moins même que le monastère de la Panagia Spiliani y a élu domicile au dix-septième siècle. Sa position au sommet d’un éperon rocheux, face à la mer, était stratégiquement excellente. Sur ma seconde et sur ma troisième photos ci-dessus, on voit l’étroit escalier qui mène au monastère.

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

Il me faut aussi évoquer des natifs célèbres de Nisyros. Je dis célèbres, mais j’avoue ne pas les connaître, et n’avoir presque rien trouvé sur eux. Ces deux frères Cazavis (1893-1967 et 1898-1972) sont nés et ont grandi ici. La plaque apposée auprès de ces médaillons dit que, par leurs mots et leurs actions, ils ont fait connaître en Amérique l’histoire et la culture de leur terre d’origine. Il est aussi dit qu’ils ont lutté pour la libération du Dodécanèse. J’ai trouvé sur Internet une allusion à deux livres écrits par le plus jeune: est-ce cela qui fait dire qu’ils ont diffusé la connaissance de Nisyros?

Nisyros 01, vues urbaines et sur Gyali. Les 12 et 13 septembre 2014

C’est une liberté laissée à tout un chacun, dans une démocratie, de choisir l’endroit où il se trouve le plus à l’aise. Pour ma part, je ne trouve pas qu’une poignée de porte soit le lieu le plus confortable pour m’asseoir, mais je ne contesterai certes pas à ce chat le droit de préférer ce type de siège à un coussin moelleux. Car il ne faut pas croire qu’il n’ait fait que bondir là pour aller ailleurs, non, pas du tout: il était là quand nous sommes passés par cette rue, je me suis arrêté, je l’ai pris en photo (il me regardait opérer très calmement), puis nous avons poursuivi notre chemin, et après une minute je me suis retourné et j’ai constaté qu’il n’avait pas bougé de là. Aussi l’ai-je jugé digne de clore le présent article.

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3 octobre 2017 2 03 /10 /octobre /2017 23:55

Sur cette longue île de Cos, la capitale est située à l’extrémité nord-est. À l’autre bout, l’île se resserre en une sorte d’isthme vers une presqu’île. Un isthme qui fait quand même environ un kilomètre et demi de large. Et juste au débouché de cet isthme, environ quatre kilomètres avant d’arriver à Kéfalos qui est le dernier bourg avant le bout de l’île, une petite route mène, en quelques centaines de mètres, à la côte sud et à la basilique paléochrétienne dédiée à Agios Stefanos, c’est-à-dire saint Étienne (ou Stéphane, puisque ce sont les deux formes d’un même nom, ou encore Steve en anglais, ou Esteban en espagnol).

Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014

Là, juste en face, tout près de la côte, se trouve un îlot nommé Kastri. Quand, comme sur ma photo, des buissons cachent ce bras de mer, on a l’impression que cette énorme roche et cette petite église blanche sont sur un simple promontoire. Non, ils sont sur l’îlot. C’est un petit monastère dédié à saint Antoine qui est isolé là. Autrefois, un pont reliait Kastri à l’île principale de Cos, mais un tremblement de terre l’a détruit, et il n’a pas été reconstruit.

Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014

À part Kastri, la basilique que nous allons voir est sur un promontoire, face à la mer. Seules apparaissent au loin d’autres îles, et en regardant la carte de la mer Égée orientale je pense que cette île, en face et à droite, est Nisyros. Il semble qu’en plein milieu de ma photo, il y ait une autre île, plus petite, devant celle qui s’étend vers la droite, et si tel est le cas cette île serait Gyali. Quant à la pointe de terre sur la gauche, ce serait l’extrême pointe de l’île de Cos, le cap Krikelos. Sous toutes réserves.

Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014
Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014
Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014

On parle de la basilique paléochrétienne d’Agios Stefanos, mais en réalité il y en a deux, et leur construction s’est étalée de la toute fin du cinquième siècle (496) jusqu’au milieu du sixième siècle (554). Si elles sont contemporaines l’une de l’autre et si elles partageaient un même baptistère, elles ne sont pourtant pas jumelles, car l’une est nettement plus grande que l’autre. Mes photos ci-dessus montrent la petite basilique. Quoique petite, elle comportait trois nefs, les nefs latérales étant étroites. On voit que des piliers massifs séparaient les nefs. Ils alternaient, paraît-il, avec des colonnes, mais je n’ai guère vu que ces piliers de pierre.

Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014
Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014
Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014

Et ici, c’est la grande basilique, avec sa nef centrale, la colonne unique restante sur la ligne qui sépare la grande nef de la nef latérale droite (sud), et la nef latérale gauche (nord). Sur la première comme sur la troisième photos ci-dessus, on aperçoit le tronc de la colonne qui fait le pendant, à gauche, de la seule colonne debout. Mais en observant bien, on constate que sur la troisième photo, au tout premier plan sur la droite, apparaît in tronc de colonne curieusement évidé au centre.

Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014
Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014

Et cette colonne évidée n’est pas unique, car le tronc de colonne séparant la nef gauche au niveau du chœur est, elle, remplie de briques et de mortier. Et de même, cette colonne brisée au sol a vomi ses briques et son mortier qui étaient montés autour d’un fer d’armature. Et d’ailleurs, en arrière-plan de cette dernière photo, ce pied de colonne semble fait de fragments de pierre collés sur du ciment et, contrairement aux colonnes qui reposent habituellement leurs solides pieds de marbre sur le sol, elle a été collée au ciment sur une grosse pierre. Ne serait-ce pas alors, plutôt que du marbre, du ciment peint, imitation marbre? J’en serais très étonné, mais il serait encore plus étonnant que l’on se soit appliqué à évider des colonnes de marbre massif et à les remplir de briques, travail énorme, très délicat, et les fragilisant sans aucun avantage en compensation.

Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014
Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014

Avant de quitter cette basilique, encore deux photos d’éléments qui la constituaient, un pied et un fût de colonne. Autre élément décoratif, le sol de ces deux basiliques est fait de mosaïques représentant des dessins géométriques et des oiseaux. Je ne les montrerai pas, parce qu’elles sont recouvertes de gravier pour les protéger. Protection contre les intempéries, nous dit-on, mais je ne crois pas que la pluie leur soit plus nuisible que la pression de ce gravier sous les pas des visiteurs, et je pense qu’il s’agit plutôt d’empêcher les touristes d’en prélever quelques tesselles comme souvenir. Je disais que les basiliques avaient été achevées au sixième siècle. Et c’est en ce même sixième siècle qu’un tremblement de terre les a détruites.

Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014
Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014
Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014

Pour comprendre ce que nous voyons, notre seule aide est constituée par les guides que nous avons emportés, car sur le site il n’y a aucun panneau explicatif. Or l’un de mes petits livres sur Cos ne dit quasiment rien, et mon cher Bibendum, du Guide Vert que j’apprécie généralement beaucoup, se contente de trois lignes, pas une de plus, concernant Agios Stefanos. Reste, au retour, l’excellent site viagallica, mais on n’est plus sur place…

 

Tout cela pour dire que les salles que montrent mes photos ci-dessus, je ne sais pas trop à quoi elles servaient. Peut-être celle de ma troisième photo, puisqu’elle comporte un (tout petit) bassin au centre est-elle le baptistère commun aux deux basiliques?

Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014
Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014
Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014

Celui de mes guides qui est nettement mieux documenté, Kos the Island and the City (Mediterraneo Editions) que j’ai évoqué dans mon article au sujet du château d’Antimakheia, précise qu’à l’ouest de la grande basilique, donc du côté opposé au chœur, on entrait dans l’église par un narthex. Plus tard que la construction des basiliques, sans doute au septième siècle, a été aménagé un grand atrium auquel on accédait par un grand escalier. Cet escalier, ainsi que le vaste espace de l’atrium avec ses colonnes, sont bien visibles et identifiables. Et là encore, l’observation d’une colonne que je montre au premier plan de ma dernière photo ci-dessus révèle un détail qui est à l’inverse de ce que l’on a vu dans la grande basilique: ici, les colonnes sont en granit massif, cela ne fait aucun doute, et leur structure solide repose sur le sol sans le secours de ciment, mais il semble que ce granit ait été recouvert d’un enduit de ciment…

Cos 09, basilique paléochrétienne Agios Stefanos. Jeudi 11 septembre 2014

Pour finir, une autre photo de cet atrium qui laisse voir sa situation par rapport à une grande et belle plage, assez désertée en cette fin d’été, mais qui en pleine saison est intégralement recouverte de corps. C’est sans doute parce que le sable et la mer attirent beaucoup plus les touristes que les basiliques d’Agios Stefanos, que les services du ministère de la culture, ceux de la municipalité, les éditeurs de guides, attachent si peu d’importance et d’intérêt à ces bâtiments paléochrétiens dépourvus d’explications. Dommage.

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1 octobre 2017 7 01 /10 /octobre /2017 23:55
Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014

Nous avions lu qu’il y avait les ruines d’une basilique paléochrétienne près de Mastikhari, sur la côte de l’île orientée nord-ouest. Nous nous sommes rendus là-bas. Dans le village de Mastikhari, sous la protection de Poséidon, le dieu qui règne sur les mers (profitons-en, car on sait combien il peut être dangereux et combien il a la rancune tenace, demandez donc à Ulysse ce qu’il en pense!) on nous a dit “N’allez pas là-bas, il n’y a pas même trois pierres, ce n’est absolument pas intéressant”. Bon. Nous nous sommes un peu baladés dans le village, dans les dunes, et puis il était tard, c’était après notre visite du kastro d’Antimakheia, nous sommes rentrés à Cos-ville.

Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014
Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014
Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014

Une fois rentrés, nous nous sommes dit que ces dunes et cette plage étaient très belles et méritaient la promenade, et que nous pourrions y retourner. N’attendant rien de la basilique paléochrétienne, nous ne risquions pas d’être déçus, mais elle pouvait constituer le motif d’une balade dans la nature. Deux jours plus tard, nous étions de nouveau à Mastikhari. Pendant un temps, nous avons suivi la côte, car le spectacle de la mer ne nous lasse jamais. En regardant la carte de la mer Égée orientale, je pense que la terre que l’on voit à l’horizon de ma première et de ma troisième photos ci-dessus ne peut être que l’île de Kalymnos.

Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014

Cette dune, ce n’est pas seulement un cordon côtier, elle s’enfonce davantage dans les terres. Nous avons pris un petit chemin en nous éloignant un peu de la côte. Sur ma photo, on voit quelques pierres prises dans des buissons, je ne sais ce qu’a pu être cette construction. Elle n’est pas jeune, mais je ne saurais en dire plus, si elle a cent ans, ou mille ans, ou plus…

Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014
Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014

En ce mois de septembre, il y a moins de touristes, et les Grecs sont aussi au travail, les enfants et les adolescents ont repris les cours plus tôt que les jeunes Français, nous ne voyons pas grand monde. Mais depuis que nous nous sommes un peu éloignés de la plage, il n’y a plus personne, il n’y a pas une seule trace de pas dans le sable. Ah, si, pardon, il y a quelques pas d’oiseau.

 

Et j’ajoute une photo de cette jolie fleur (une espèce de lys? Je n’y connais rien!) qui arrive à pousser en plongeant ses racines dans le sable. Ni la sécheresse du sable, ni le sel des embruns, ne l’ont empêchée de se développer et d’éclore.

Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014

Nous continuons en suivant ce petit sentier, et nous allons bientôt arriver. Depuis Mastikhari, c’est une petite promenade. Ce n’est pas tout près, je ne saurais dire la distance (je n’ai pas regardé ma montre), peut-être environ deux kilomètres, mais ce n’est pas une randonnée!

Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014

Et nous y voilà. Il est vrai que lorsqu’on la découvre au bout du sentier, derrière ses buissons, cette église paléochrétienne, on a l’impression qu’il n’y a que des pierres éparses au sol. Quand même pas trois pierres,  comme on nous avait dit, mais pas grand-chose. Mais ce n’est qu’une première impression.

Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014
Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014

En effet, on voit très nettement l’abside semi-circulaire de l’ancienne basilique, ainsi que son étroit déambulatoire. Comme dans l’architecture romaine, des rangs de briques rouges sont intercalés dans les murs de pierre. La base d’une colonne est encore dans le sol.

Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014
Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014

C’était une grande basilique construite au cinquième siècle, et consacrée à saint Jean l’Évangéliste (ο Άγιος Ιωάννης ο Θεολόγος, saint Jean le Théologien). Vue de cette façon, c’est-à-dire en tournant le dos au chœur, on distingue la vaste nef centrale, la rangée de colonnes de part et d’autre, et les deux nefs latérales au-delà des colonnes. Il n’y a pas de transept dans les basiliques de cette époque, mais deux colonnes dans la nef principale délimitent le chœur. Comme c’est l’usage, l’église est orientée, c’est-à-dire le chœur tourné vers l’orient, et cette première vue ci-dessus est donc en direction de l’ouest.

Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014
Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014

Au bout, à l’ouest, il y avait un narthex, comme le montrent les deux photos ci-dessus. Il y avait en outre sur le côté nord, donc à gauche en regardant vers le chœur, un baptistère attenant. Je lis sur Internet qu’un grand nombre d’églises de Cos sont consacrées à saint Jean quoiqu’il n’ait passé qu’une nuit sur l’île. J’aurais voulu retrouver le texte qui parle de ce passage de Jean à Cos, je ne crois pas que ce soit dans les Actes des Apôtres, alors où est-ce?

Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014
Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014

Le sol de la basilique était recouvert de mosaïques, il y en avait quatre cents mètres carrés. Ils représentent des dessins géométriques, des plantes, des animaux. On n’en voit que très peu, mais ce n’est pas parce que ces mosaïques ont été détruites, ou qu’elles ont été transférées dans un musée. Elles sont bien là, mais recouvertes de gravier pour les protéger, ce gravier que l’on voit au sol de plusieurs de mes photos précédentes. Néanmoins, le peu qu’on en voit permet d’apprécier leur qualité.

Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014
Cos 08, dunes et basilique de Mastikhari. Les 9 et 11 septembre 2014

Et puis, au sol, ici ou là, gisent des fragments de colonnes et diverses pierres sculptées. En conclusion, je dirai que s’il est vrai que ce n’est pas une visite à couper le souffle, elle est cependant fort intéressante, et vaut la peine: il y a d’abord la promenade dans les dunes, puis il y a un ensemble de ruines, certes en mauvais état, mais tout à fait “lisibles” cependant.

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29 septembre 2017 5 29 /09 /septembre /2017 23:55

Dans cette île de Cos, nous aimons beaucoup la capitale, nous y avons vu de nombreux lieux intéressants, et puisque nulle part dans cette île il n’existe de camping c’est sur un parking de la ville, près du site archéologique ouest, que nous avons établi nos pénates, je veux dire notre camping-car. Mais la “province” de Cos est très loin de démériter, et mes articles Cos 07, Cos 08 et Cos 09 seront consacrés à trois sites hors de cette capitale. Je commence cette série par un kastro, c’est-à-dire un château fort médiéval, situé à Antimakheia.

 

Ce nom, Αντιμάχεια, on le trouve orthographié de diverses façons. D’abord, parce qu'en grec moderne le groupe de consonnes NT (ντ) se prononce D, ou ND avec un N très doux, presque inexistant, c’est parfois par un D qu’on le transcrit. Ensuite, la lettre χ qui, en grec ancien, était un K aspiré (on la trouve dans schéma, chronologie, etc.), se prononce aujourd’hui un peu comme le G final de l’allemand König, ou comme le CH de l’allemand Ach, et beaucoup plus doux que la jota espagnole, ce qui fait que des éditeurs le transcrivent parfois par un simple H, se référant à l’usage anglais, et non français, d’aspirer fortement le H dans des mots comme hand, home, behaviour. Enfin, l’ancienne diphtongue EI (ει) se prononce aujourd’hui I. C’est ainsi que lorsque l’on voit Adimahia, c’est un choix de transcription pour Antimakheia. Choix qui n’est pas le mien, car alors je n’écrirais plus week-end, mais ouiquènnede, ni T-shirt, mais ticheurte

Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014

Antimakheia, c’est un village situé à un peu plus de vingt kilomètres au sud de la capitale, à proximité immédiate de l’aérodrome, et le kastro que nous allons visiter aujourd’hui est à peu près à mi-distance à vol d’oiseau du village et de la côte sud-est de l’île. On a l’habitude de voir ces châteaux défensifs face à la mer, pour pouvoir lutter contre les invasions, ou sur une acropole, pour protéger les habitants et la ville qui se développe à ses pieds, on n’a guère l’habitude de les voir s’élever en dehors des lieux habités ou en rase campagne, loin des lieux où le péril peut arriver. La colline où il a été bâti est haute de 170 mètres, ce qui procure toutefois une vue très vaste sur l’île. Et c’est là son intérêt, il est bâti en plein centre de Cos, à peu près à mi-distance du nord et du sud, avec vue sur les deux côtes à l’est et à l’ouest. De là-haut on peut surveiller toute l’île, tous les mouvements.

Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014

La première de ces photos est prise côté terre, le sol est nu, il n’y a rien. La seconde, je l’ai prise entre deux créneaux de la citadelle, la terre est brûlée et nue, à part une toute petite coulée de verdure. Et la troisième, également d’en haut, depuis la citadelle, côté mer au loin; il suffit de consulter la carte pour comprendre que ce que l’on voit à l’horizon, c’est l’île de Nisyros et son volcan, notre prochaine escale. À l’époque moderne quelques maisons se sont construites sur la côte, c’est une longue plage où parfois viennent des baigneurs, mais des bateaux ennemis n’auraient pu accoster parce qu’il n’y avait pas de môle donnant un tirant d’eau suffisant (aujourd’hui un port a été aménagé), et de toutes façons les canons du château n’auraient pas porté aussi loin.

Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014

Ci-dessus, une porte latérale, fermée à la visite, qui permettait de pénétrer dans cet énorme bastion semi-circulaire, et un peu plus loin l’accès à l’entrée principale vers la cour du château. Il y avait là un ancien petit château byzantin quand les Chevaliers de Saint-Jean ont édifié, de 1337 à 1346, une forteresse beaucoup plus puissante. À l’époque, le Grand Maître était Hélion de Villeneuve, qui a assumé ces fonctions de 1319 à 1346. Comme il ne devait pas être très distrayant de vivre ici, l’Ordre a décidé, en 1383, d’y envoyer comme prisonniers les Chevaliers que l’on voulait punir. En outre, du fait de son isolement et de sa position retirée, le château pouvait être considéré comme un refuge pour la population en cas de danger; par exemple en 1457, lorsque les Turcs sont arrivés en force, avec cent cinquante-six navires et seize mille hommes, le château a pu accueillir des milliers d’habitants. Il n’a pu avoir de rôle prépondérant dans la défense de l’île, mais au moins il a gardé les habitants en sécurité pendant les vingt-trois jours qu’a duré la bataille entre les assaillants et les Chevaliers, dans les autres châteaux et déployés sur le terrain.

Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014

Plus tard, le Grand Maître Pierre d’Aubusson (1473-1503) dont j’ai eu l’occasion de parler au sujet du kastro de Neratzia, dans la capitale, a jugé opportun de renforcer puissamment les défenses du kastro d’Antimakheia, opération commencée en 1490 et, si l’on en croit la date sculptée au bas du blason placé au-dessus de la porte, terminée en 1494. En 1493, un séisme a secoué l’île et causé de gros dégâts au kastro. La réparation est incluse dans les travaux de fortification de d’Aubusson. Ce blason, nous avons appris à l’identifier en visitant le château de Neratzia, c’est celui de Pierre d’Aubusson. Et nous avons aussi appris qu’en 1486 il avait été fait cardinal, et puisque ce blason est postérieur à cette date il est surmonté du chapeau attaché à cette dignité.

 

Un peu plus tard, un autre Grand Maître, Fabrizio del Carretto (1513-1521) qui a déjà fortifié Neratzia, va construire ici un puissant bastion en fer à cheval. Mais quand, en 1522, les Turcs parviennent à prendre Rhodes, les Chevaliers doivent également quitter Cos, et le kastro d’Antimakheia tombe entre les mains des Ottomans, en même temps que le reste de l’île de Cos.

Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014

Durant l’occupation ottomane, les bâtiments du kastro ont continué d’être habités, et pour cela on a construit une mosquée dans l’enceinte. Mais vers le milieu du dix-neuvième siècle les habitants ont quitté le château, créant des villages à l’extérieur, et les bâtiments ont été abandonnés. Puis les Turcs ont dû quitter l’île et la mosquée a été détruite. Par deux fois, en 1926 et en 1933, l’île a été secouée par de violents séismes qui ont détruit la plupart des bâtiments encore debout, mais les murailles ont résisté.

Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014

Nous allons maintenant faire un tour, pour voir ce qui n’a pas été détruit par le temps, les hommes, les séismes. En voyant, dans la pierre, ces trous qui semblent être l’aboutissement d’une rigole, je suppose qu’il s’agit d’un écoulement des eaux de pluie, mais en l’absence de toute explication je ne saurais l’affirmer. Bon, ma visite commence mal!

Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014

De même ici, devant cette fosse semi-cylindrique, je me pose des questions. Au fond, je vois des orifices qui correspondent à des arrivées ou à des évacuations d’eau… J’aurais bien pensé à une petite citerne, mais les parois ne portent aucune trace d’un quelconque enduit hydrofuge. J’ai cependant un guide de Cos (éditions Marmatakis) qui n’évoque le kastro qu’en quelques mots: “À visiter […] et à 3 km, sur la colline, le château vénitien avec ses citernes, ses salles et deux églises en bon état”. Pas un mot de plus, mais justement les citernes. Et dans cette évocation, si brève, si minime, une erreur grossière qui attribue la construction aux Vénitiens. Faut-il croire aux citernes? Dans ces conditions, je n’ai aucune réponse, même hypothétique, à donner à mes questions…

Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014

Deux bâtiments sont bien conservés dans le kastro, ce sont deux chapelles. Celle-ci est dédiée à saint Nicolas (agios Nikolaos). Elle date du quatorzième siècle, et les trois sources que j’ai consultées la disent toutes trois post-byzantine. Quand l’île n’appartenait plus aux Byzantins, donc était confiée aux Chevaliers. Pourquoi n’est-il pas dit qu’elle est l’œuvre des Chevaliers? Faut-il comprendre que ce n’est pas eux qui l’ont construite,  mais qu’elle a été englobée dans le château lorsqu’il s’est amplifié? Je ne pense pas. Sans doute l’un des auteurs s’est-il exprimé ainsi, et les autres, guides imprimés et sites Internet, ont tout simplement recopié l’expression.

 

Au-dessus de la porte, une pierre porte trois blasons. En haut à gauche, pas de doute, c’est celui du Grand Maître Fabrizio del Carretto. Les deux autres blasons, je ne sais les identifier, car ceux de tous les Grands Maîtres sont écartelés (c’est-à-dire partagés en quatre quartiers), la première et la quatrième parties représentant la croix de l’Ordre, la seconde et la troisième appartenant en propre au chevalier. Or le blason en haut à droite et le blason du bas ne sont pas écartelés. En outre, la croix de l’Ordre a été martelée sur le blason de Carretto. J’ai lu que cette pierre qui porte la date de 1520, compatible avec les dates de Carretto (1513-1521), avait sans doute été apportée ici provenant d’ailleurs. Ce qui est sûr, c’est que la chapelle est antérieure à 1520. Reste à expliquer deux des trois blasons, et la suppression de la croix de l’Ordre de Saint-Jean (peut-être due aux Turcs, après leur victoire et leur prise de possession?).

Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014

Selon l’une de mes sources (viagallica, sur Internet), “elle abrite, dans l’abside, une fresque intéressante de saint Christophe portant l’Enfant Jésus”, et selon une autre (Mediterraneo Editions), “inside the church there is a fresco from the 15th-16th centuries”. Je publie donc cette photo de l’abside, où saint Christophe semble jouer à cache-cache! Cette fresque est peut-être intéressante, puisqu’on me le dit, mais elle est assez effacée, hélas.

Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014

Non loin, il y a une autre chapelle. Celle-là est un peu plus grande, et sa patronne est sainte Paraskevi (sainte Parascève). Datant du tout début du dix-huitième siècle, en 1705, elle a été construite près de deux siècles après le rattachement de l’île à l’Empire Ottoman. Faute de se convertir à l’Islam, les non-Turcs de l’Empire ne pouvaient avoir accès à quelque poste public que ce soit, mais ils étaient libres d’exercer les professions indépendantes de leur choix, et de pratiquer leur religion. On se rappelle, par exemple, comment les Juifs chassés d’Espagne en 1492-1493 ont été accueillis par les Ottomans. Et puisque l’île de Cos était grecque orthodoxe, il n’est pas étonnant que les gens qui habitaient dans l’enceinte du château y construisent une église.

Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014
Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014

…Libres de construire une église et d’y pratiquer leur culte, mais les cloches sont interdites. Elle ne doivent en aucun cas se substituer à la voix du muezzin, sans même parler de la couvrir en sonnant simultanément. Les cloches sont donc postérieures à la libération de l’île. C’est pourquoi cette église, comme tant d’autres, n’a pas de clocher en maçonnerie, le clocher métallique ayant été ajouté ensuite, sur le côté. Cette cloche a été fondue avec le nom de sa donatrice Maria Phorozi, précisant ”en mémoire de mes parents et de ma sœur Zacharo”. Saint Georges terrassant le dragon, le Christ en croix, sont également très beaux.

Cos 07, le kastro d’Antimakheia. Mardi 9 septembre 2014

Sur le flanc de l’église, nul doute qu’il y avait aussi un autre bâtiment, toutes ces pierres qui jonchent le sol n’auraient aucune raison de se trouver là si tel n’était pas le cas. Quel était ce bâtiment, personne n’en parle, mais si proche de l’église il me semble qu’il ne pouvait que faire partie d’un ensemble paroissial.

 

En dehors des murailles d’enceinte qui sont bien conservées, en dehors aussi de ces deux chapelles, le kastro d’Antimakheia n’offre plus à la visite que des ruines, mais je ne regrette pas notre visite des lieux parce que cet ensemble massif est majestueux et aussi parce que le paysage sévère est très beau et la vue magnifique.

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